Exposé

El Salvador : Rapport de la mission d'étude - Partie 1

Les gangs au Salvador et la situation des personnes témoins d'actes criminels et des d'Énonciateurs de la corruption

Septembre 2016

Direction des recherches, Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada, Ottawa

Tous les renseignements présentés sont référencés et demeurent à la disposition du public.

Le présent document a été préparé par la Direction des recherches de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada à l'aide de renseignements basés sur des notes d'entrevues avec des sources orales qui ont été approuvées et puisés dans des sources qui sont à la disposition du public. Tous les renseignements présentés sont référencés. Le document ne prétend pas présenter une étude exhaustive du pays, ni apporter de preuves concluantes quant au bien-fondé d'une demande d'asile particulière. Pour de plus amples renseignements sur les événements récents, veuillez communiquer avec la Direction des recherches.

Table des matières

Carte géographique

Carte géographique d'El Salvador 

Source : Nations Unies. Mai 2004. Département des opérations de maintien de la paix, Section de la cartographie. « El Salvador ». [Date de consultation : 10 juin 2016] [carte disponible en anglais seulement]

Glossaire

  • ACAP
  • Plan d'action pour la coopération en matière d'asile (Asylum Cooperation Action Plan)

  • AEAS
  • Asociación de Empresarios de Autobuses Salvadoreños (Association des sociétés salvadoriennes de transport par autobus)

  • ALDES
  • Asistencia Legal para la Diversidad Sexual - El Salvador (LGBTI Justice Clinic) (Assistance juridique pour la diversité sexuelle du Salvador (Clinique juridique LGBTI))

  • ANSP
  • Academia Nacional de Seguridad Pública (Académie nationale de la sécurité publique)

  • APES
  • Asociación de Periodistas de El Salvador (Association des journalistes du Salvador)

  • CISR
  • Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada

  • CNSCC
  • Consejo Nacional de Seguridad Ciudadanía y Convivencia (Conseil national de la sécurité publique et de la coexistence)

  • COMAR
  • Comisión Mexicana de Ayuda a Refugiados (Commission mexicaine d'aide aux réfugiés)

  • CONASOJ
  • Coordinadora Nacional de Sindicatos y Asociaciones del Órgano Judicial (Comité national de coordination des syndicats et associations des travailleurs du système judiciaire)

  • CSJ-SP
  • Corte Suprema de Justicia, Sala de lo Penal (Cour suprême de justice, Chambre pénale)

  • DGCP
  • Dirección General de Centros Penales (Direction générale des pénitenciers)

  • FESPAD
  • Fundación de Estudios para la Aplicación del Derecho (Fondation pour l'étude du droit appliqué)

  • FGR
  • Fiscalía General de la República (Bureau du procureur général)

  • HCR
  • Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés

  • IDHUCA
  • Instituto de Derechos Humanos de la Universidad Centroamericana "José Simeón Cañas" (Institut des droits de la personne de l'Université centraméricaine José Simeón Cañas)

  • IGSP
  • Inspectoría General de Seguridad Pública (Bureau de l'inspecteur général de la sécurité publique)

  • IML
  • Instituto de Medicina Legal (Institut de médecine légale)

  • IRCC
  • Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada

  • IUDOP
  • Instituto Universitario de Opinión Pública (Institut universitaire de l'opinion publique)

  • ORMUSA
  • Organización de Mujeres Salvadoreñas por la Paz (Organisation des femmes salvadoriennes pour la paix)

  • PDDH
  • Procuraduría para la Defensa de los Derechos Humanos (Bureau du protecteur des droits de la personne)

  • PNC
  • Policía Nacional Civil (Police nationale civile)

  • SAR
  • Section d'appel des réfugiés

  • SCIS
  • Sociedad de Comerciantes e Industriales Salvadoreños (Société des commerçants et des industriels salvadoriens)

  • SIMEDUCO
  • Sindicato de Maestras y Maestros de la Educación Pública de El Salvador (Syndicat des enseignantes et enseignants de l'éducation publique du Salvador)

  • SPR
  • Section de la protection des réfugiés

  • SRE
  • Secretaría de Relaciones Exteriores (Secrétariat des Affaires étrangères du Mexique)

  • UTE
  • Unidad Técnica Ejecutiva (Unité technique exécutive)

  • USCIS
  • United States Citizenship and Immigration Services (Services de la citoyenneté et de l'immigration des États-Unis)

1. Introduction

En 2013, le Canada et les États-Unis ont uni leurs efforts pour tenter d'établir de nouveaux modes de coopération dans les domaines de l'asile et de l'immigration; cette collaboration s'inscrit dans le Plan d'action pour la coopération en matière d'asile (Asylum Cooperation Action Plan - ACAP). Les responsables de l'ACAP ont communiqué avec la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (CISR) par l'entremise du ministère de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté du Canada (IRCC), afin de savoir si la CISR était intéressée à appuyer les activités de renforcement des capacités qui seraient entreprises dans les Amériques dans le but d'améliorer les régimes d'asile sur le continent. En mai 2015, la vice-présidente de la Section de la protection des réfugiés (SPR) a participé à une rencontre entre le Canada, le Mexique et les États-Unis, où il a été convenu que la CISR entreprendrait un certain nombre d'activités en vue de l'élaboration d'un processus de qualité pour la reconnaissance du statut de réfugié au Mexique. Dans le cadre de l'une de ses activités, la CISR a pris part à une mission d'étude au Salvador (ci-après désignée la « mission »), de concert avec des représentants des Services de la citoyenneté et de l'immigration des États-Unis (United States Citizenship and Immigration Services - USCIS), de la Commission mexicaine d'aide aux réfugiés (Comisión Mexicana de Ayuda a Refugiados - COMAR) et du Secrétariat des Affaires étrangères (Secretaría de Relaciones Exteriores - SRE) du Mexique, sous l'égide du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) au Mexique et au Salvador. Un représentant de l'ambassade du Mexique au Salvador a aussi pris part à la mission conjointe, qui s'est déroulée du 11 au 15 avril 2016. Au terme de la mission conjointe, la CISR a passé une autre semaine à effectuer ses propres recherches au Salvador. L'objectif de la deuxième semaine était de rencontrer d'autres sources d'information spécialisées qui n'avaient pu être incluses dans le calendrier de la mission conjointe en raison de contraintes de temps, dans le but de recueillir des renseignements concordants ou divergents, et pour permettre à la Direction des recherches de la CISR d'établir de nouveaux contacts, de renforcer les contacts existants et de recueillir des renseignements devant servir à la prise de décisions par la CISR sur la reconnaissance du statut de réfugié, dans le présent et à l'avenir.

Le but de la mission au Salvador était de recueillir des renseignements sur les questions suivantes : les efforts de l'État pour lutter contre la criminalité; la structure des gangs criminels, leurs zones d'activité, leurs activités et leurs pratiques de recrutement; la violence fondée sur le sexe et la violence conjugale à l'endroit des femmes; la situation des personnes LGBTI (lesbiennes, homosexuelles, bisexuelles, transgenres et intersexuées); et l'efficacité de la police et de l'appareil judiciaire à offrir des possibilités de recours aux victimes d'actes criminels, à mener des enquêtes et à intenter des poursuites. Le présent rapport résume les renseignements recueillis par les représentants de la CISR dans le cadre de la mission conjointe et durant la semaine subséquente de recherches effectuées par la CISR.

La CISR tient à remercier l'ambassade du Canada à San Salvador et les bureaux du HCR à San Salvador et à Mexico pour leur soutien logistique et leur assistance durant la mission.

2. Méthodologie

La mission a consisté en une série de rencontres avec des spécialistes et des représentants d'organisations gouvernementales, non gouvernementales, universitaires et consacrées à la recherche. Pour de plus amples renseignements sur les organisations et les personnes consultées durant la mission, veuillez vous reporter à la section intitulée « Notes sur les interlocuteurs », à la fin du présent document. Les interlocuteurs choisis pour les entrevues, c'est-à-dire les sources orales, ont été sélectionnés par la délégation en fonction de leur position et de leur expertise. Toutefois, on ne saurait considérer cette liste de sources comme étant exhaustive pour ce qui est de l'étendue et de la complexité des questions liées aux droits de la personne au Salvador, compte tenu des contraintes de temps auxquelles la délégation était soumise dans la réalisation de sa mission. Le bureau du HCR à San Salvador a coordonné les rencontres entre les interlocuteurs et la mission conjointe, qui ont eu lieu dans les bureaux des interlocuteurs ou au siège du HCR à San Salvador. L'ambassade du Canada à San Salvador et le bureau du HCR à San Salvador ont coordonné les rencontres entre la CISR et les interlocuteurs lors de la deuxième semaine; ces rencontres ont eu lieu à l'ambassade, au bureau du HCR ou aux bureaux des interlocuteurs, sauf l'entrevue avec l'Assistance juridique pour la diversité sexuelle du Salvador (Asistencia Legal para la Diversidad Sexual - El Salvador - ALDES), qui s'est déroulée au téléphone. Toutes les entrevues ont été réalisées en espagnol, sauf celle avec l'ALDES, qui a été réalisée en anglais.

Les questions d'entrevue ont été formulées à la lumière du mandat de la mission (voir l'Annexe). Il s'agissait d'entrevues semi-structurées, de sorte qu'elles puissent être adaptées à l'expertise de l'interlocuteur interviewé. Le mandat a été élaboré de concert avec les participants de la mission conjointe et les décideurs de la Section de la protection des réfugiés (SPR) et de la Section d'appel des réfugiés (SAR) de la CISR. Les réponses des interlocuteurs à ces questions variaient selon qu'ils étaient disposés et préparés à y répondre, et selon la durée prévue de l'entrevue.

Conformément à la méthodologie de la Direction des recherches, qui se fonde sur de l'information accessible au public, on a avisé les interlocuteurs que les renseignements qu'ils fourniraient serviraient de fondement à un rapport sur la situation au Salvador. Ce rapport serait publiquement accessible et serait utilisé par des décideurs chargés d'examiner les demandes d'asile au Canada. De plus, on a demandé aux interlocuteurs de consentir à ce que leurs noms soient cités en lien avec les renseignements qu'ils fournissaient.

Le présent document est le premier de deux exposés dans lesquels la CISR présente les renseignements recueillis durant la mission au Salvador. Le présent document se penche sur la criminalité, les gangs, les possibilités de déménager ailleurs au pays et les mécanismes de la protection offerte par l'État à l'égard des victimes d'actes criminels. Un deuxième document, distinct de celui-ci, fournira des renseignements sur la violence fondée sur le sexe et la violence conjugale à l'endroit des femmes, sur la situation des personnes LGBTI, ainsi que sur les recours juridiques à leur disposition.

Plusieurs autres publications de la CISR peuvent complémenter la lecture du présent document, notamment les réponses aux demandes d'information SLV104900 en date du 14 juillet 2014, SLV105258 en date du 1er septembre 2015, SLV105259 en date du 2 septembre 2015, SLV105260 en date du 8 septembre 2015 et SLV105261 en date du 18 septembre 2015.

3. Aperçu

La population du Salvador est estimée à 6 141 350 habitants, et sa superficie est d'environ 20 721 kilomètres carrés, soit à peu près la taille du New JerseyNote de bas de page 1. De 1980 à 1992, le Salvador a été le théâtre d'une guerre civile opposant le gouvernement et le Front Farabundo Martí de libération nationale (Frente Farabundo Martí para la Liberación Nacional - FMLN)Note de bas de page 2. Après l'accord de paix de 1992, des réformes en matière d'indépendance judiciaire et une réforme électorale ont été proposées, et de nouvelles institutions ont été créées, dont la Police nationale civile (Policía Nacional Civil - PNC) et le Conseil national de la magistrature (Consejo Superior de la Judicatura)Note de bas de page 3.

Dans les années 1990, les États-Unis ont procédé à des expulsions massives de ressortissants non américains d'origine centraméricaine, les renvoyant à leurs pays d'origineNote de bas de page 4 au terme de leur peine d'emprisonnementNote de bas de page 5. Bon nombre de ces expulsés avaient fui le Salvador durant la guerre civile et s'étaient rendus aux États-Unis, puis avaient joint les rangs de gangs américains, la Mara Salvatrucha (MS-13) et le Barrio 18 (M-18)Note de bas de page 6. Ces gangs ont vu le jour à Los Angeles, en Californie, et se sont répandus en Amérique centrale à la suite des expulsionsNote de bas de page 7. Des sources ont expliqué que, au moment des expulsions, au début des années 1990, les institutions du pays étaient défaillantes parce que l'État amorçait les réformes découlant de l'accord de paix de 1992 qui avait mis fin à la guerre civileNote de bas de page 8. Selon des sources, c'est dans ce contexte historique que le phénomène des gangs au Salvador a pris de l'ampleur, s'est transformé et a gagné en puissanceNote de bas de page 9. Le vice-ministre de la Justice et de la sécurité publique a affirmé que le problème des gangs trouve ses racines dans l'érosion du tissu social et la faible présence de l'État après la guerreNote de bas de page 10. D'autres sources ont affirmé que la pauvreté est un terrain fertile à l'expansion des gangsNote de bas de page 11.

En 2003, le gouvernement du Salvador a adopté les politiques mano dura (main de fer) et super mano dura (super main de fer) pour combattre l'escalade de la violence commise par les gangsNote de bas de page 12, en mettant en place des mesures, notamment l'emprisonnement immédiat de personnes qui affichaient certains comportements ou traits extérieurs, tels qu'un tatouageNote de bas de page 13, qui avaient un style vestimentaire ou un style de coiffure particulier ou qui se tenaient en groupesNote de bas de page 14. En conséquence, bon nombre de personnes ont été accusées de faire partie d'un gang et ont été détenusNote de bas de page 15, de sorte que la population carcérale a augmenté pour atteindre 8 000 prisonniers en 2008, soit deux fois plus qu'en 2004Note de bas de page 16. Dans une étude sur la situation en matière de sécurité au Salvador entre 2009 et 2014, réalisée par l'Institut universitaire d'opinion publique (Instituto Universitario de Opinión Pública - IUDOP) à l'Université centraméricaine José Simeón Cañas et communiquée par le directeur de l'IUDOP au cours de la rencontre avec la Direction des recherches, on peut lire que, selon des statistiques fournies par la Direction générale des pénitenciers (Dirección General de Centros Penales - DGCP), il y avait 11 451 détenus dans les pénitenciers salvadoriens en 2003, 12 525 en 2005, 17 677 en 2007, 21 032 en 2009, 25 471 en 2011, et 26 848 en 2013Note de bas de page 17. Selon des sources, au lieu de s'améliorer, le problème des gangs s'est aggravé, car les gangs sont devenus mieux organisés au sein des prisonsNote de bas de page 18. ¸À l'heure actuelle, le gouvernement n'a élaboré aucun programme de prévention visant le recrutement des gangsNote de bas de page 19. Les principaux gangs qui sont présentement actifs au Salvador sont la Mara Salvatrucha et le Barrio 18. Toutefois, comme l'a signalé le journaliste Carlos Martínez d'El Faro, en 2005, après un long processus de purges et de conflits internes, le Barrio 18 s'est scindé en deux factions rivales : le Barrio 18 Revolucionarios et le Barrio 18 Sureños.

Durant la mission, plusieurs sources ont qualifié le niveau de criminalité au Salvador de [traduction] « critique »Note de bas de page 20. D'après le directeur de l'IUDOP, il est très facile de se procurer des armes au Salvador et, selon l'estimation de l'IUDOP, 80 p. 100 des crimes sont commis à l'aide d'armes à feu. De même, selon un rapport sur les homicides ayant eu lieu en 2015 préparé par l'Institut de médecine légale (Instituto de Medicina Legal - IML), 83,2 p. 100 des homicides commis au cours de cette année-là l'avaient été au moyen d'une arme à feuNote de bas de page 21. Les gangs sont en mesure de se procurer des armes sophistiquées de gros calibre pour commettre leurs crimesNote de bas de page 22. Selon l'IUDOP, en raison du contexte de sécurité, les civils s'arment de plus en plus. Le taux d'homicides au Salvador en 2015 était de 103 homicides par 100 000 habitantsNote de bas de page 23, comparativement à 64,2 en 2014Note de bas de page 24. Dans un article publié par La Prensa Gráfica, un journal de San Salvador, sur les homicides qui ont été commis en 2015 au Salvador, on peut lire que le taux d'homicides en Amérique centrale en 2015 était de 40,2Note de bas de page 25.

D'après El Faro, les problèmes de sécurité liés aux gangs au Salvador sont [traduction] « très complexes ». Mauricio Gaborit, professeur de psychologie sociale à l'Université centraméricaine José Simeón Cañas, a expliqué que, même si le gouvernement dispose d'un plan stratégique en matière de sécurité qui est, de l'avis du professeur Gaborit, « très bien conçu », la mise en œuvre de ce plan s'avère difficile en raison du manque de volonté politique de négocier avec l'opposition. Il a fait valoir [traduction] « [qu']il ne s'agit pas d'un problème de ressources, mais d'un manque de leadership et de gens compétents pour gouverner et mener à bien les projets ». Il a également mentionné que la corruption nuit à l'exécution efficace des projets gouvernementauxNote de bas de page 26. Par ailleurs, d'autres sources ont signalé que la corruption est [traduction] « endémique »Note de bas de page 27 et que les institutions gouvernementales sont très faibles à cause de la corruption et des visées économiques et politiques partisanesNote de bas de page 28. De même, dans les Country Reports on Human Rights Practices for 2015 publiés par le Département d'État des États-Unis, on peut lire dans le rapport consacré au Salvador que [traduction] « [l]a loi prévoit des sanctions pénales pour les actes de corruption commis par des agents publics; toutefois, le gouvernement n'a pas mis en œuvre la loi de manière efficace, et les agents publics se sont souvent livrés à des pratiques corrompues en toute impunitéNote de bas de page 29 ».

Selon la Société des commerçants et des industriels salvadoriens (Sociedad de Comerciantes e Industriales Salvadoreños - SCIS), il y a trois types d'économie au Salvador : « l'économie officielle », qui est profondément touchée par la criminalité; « l'économie parallèle », qui constitue de 70 à 72 p. 100 de l'économie salvadorienne et dans laquelle travaille la majorité de la population en raison de la situation actuelle au pays; et « l'économie criminelle », qui est contrôlée par les gangs et les syndicats du crime organisé, et qui a une incidence directe à la fois sur l'économie officielle et l'économie parallèle. D'après la SCIS, le Salvador est en train de devenir une [traduction] « économie de subsistance », à cause de l'instabilité des gagne-pain.

Les journalistes pratiquent l'autocensure et sont vulnérables par rapport aux organisations criminellesNote de bas de page 30. L'Association des journalistes du Salvador (Asociación de Periodistas de El Salvador - APES) a affirmé que les journalistes suscitent la méfiance des gangs, qui les perçoivent comme des informateurs de la police; ils sont victimes d'intimidation, se font voler leurs caméras et se voient forcer d'effacer ce qu'ils ont filmé. De plus, ils reçoivent des menaces ou sont victimes de meurtre s'ils refusent aux membres de gangs de les laisser s'afficher dans les médiasNote de bas de page 31. Reporters sans frontières (RSF) a signalé l'assassinat de l'animateur de radio Nicolás García, survenu le 10 mars 2016 à El Carrizal, dans le département d'Ahuachapán : il a été tué par la Mara Salvatrucha après avoir refusé de collaborer avec ce gang pour lui communiquer de l'information sur les mouvements de la police dans les environsNote de bas de page 32. L'APES a aussi donné des exemples de journalistes contraints par leur employeur de couvrir des événements dans des zones de conflit, sous peine de congédiement.

3.1 La trêve de 2012-2013

La MS-13 et le M-18 ont convenu d'une trêve en 2012 et 2013 en vue d'établir un dialogue avec le gouvernement. Cependant, plusieurs sources ont affirmé que, durant cette trêve, les gangs ont gagné en puissanceNote de bas de page 33. D'après El Faro, la trêve a permis aux gangs salvadoriens [traduction] « de se donner une conscience politique nouvelle et visible, et d'apprendre à utiliser la violence de manière à atteindre leurs objectifsNote de bas de page 34 ». Grâce à la trêve, les gangs sont devenus des acteurs nationaux importants ayant le pouvoir d'influer sur le résultat des électionsNote de bas de page 35 et la politique de sécurité nationaleNote de bas de page 36. Selon El Faro, grâce à la trêve, les gangs ont compris l'importance politique de s'approprier un territoire et ils continuent de miser sur leur influence territoriale pour négocier avec les candidats politiques qui souhaitent solliciter des appuis à l'intérieur des territoires contrôlés par les gangsNote de bas de page 37. De l'avis d'El Faro, malgré leur puissance politique, les gangs ne souhaitent pas fonder de mouvement politique pour le moment et se soucient davantage de marchander leur influence territoriale en vue d'atteindre leurs objectifs. Selon le professeur Gaborit, si le taux d'homicides diminue, ce n'est pas en raison des mesures gouvernementales, mais plutôt parce que les gangs en ont ainsi décidé; si les actes d'extorsion diminuent, ce n'est pas en raison des mesures gouvernementales, mais à la suite de décisions stratégiques prises par les gangsNote de bas de page 38. Par ailleurs, InSight Crime, une organisation qui produit des analyses et des rapports concernant le crime organisé en Amérique latine et dans les CaraïbesNote de bas de page 39, signale que les gangs au Salvador détiennent une influence politiqueNote de bas de page 40.

Des sources précisent que, malgré la diminution des homicides durant la trêve, le nombre d'actes d'extorsion, de menacesNote de bas de page 41 et de disparitionsNote de bas de page 42 a augmenté. Pour des renseignements additionnels, veuillez consulter la section 4.5.

4. Gangs

D'après El Faro, l'existence des gangs symbolise l'absence de l'État. Le professeur Gaborit a expliqué que, au Salvador, l'État n'a pas su investir dans la population ou dans les communautés en leur assurant un accès adéquat à l'éducation, aux soins de santé et aux infrastructures, si bien que les habitants du pays sont très vulnérables à la criminalité, vivent dans la pauvreté et disposent de peu de possibilités d'emploi. Cette situation permet aux organisations criminelles de se développer et de prendre de l'ampleurNote de bas de page 43.

Le directeur adjoint des enquêtes (Subdirección de Investigaciones) de la PNC a affirmé que l'objectif des gangs est le contrôle territorial et les revenus que leur procure l'extorsion, communément appelés [traduction] « le loyer » (renta). Le professeur Gaborit a souligné que le territoire confère aux gangs leur identité, la sécurité, des revenus, un vaste réseau de collaborateurs et de sympathisants, et [traduction] « une communauté qui ne révélera rien aux autoritésNote de bas de page 44 ».

Les renseignements au sujet du nombre de membres de gangs au Salvador varient. D'après La Nación, un journal de San José, Costa Rica, il y a entre 30 000 et 60 000 membres de gangs au SalvadorNote de bas de page 45. Toutefois, dans un article paru dans La Prensa Gráfica, on peut lire que, selon un sondage effectué par le ministère de la Justice et de la Sécurité publique (Ministerio de Justicia y Seguridad Pública) dans 184 des 262 municipalités du pays, il y avait, en 2012 et 2013, 29 325 membres de gangs et 87 975 personnes ayant une [traduction] « affiliation » aux gangs, soit un total de 117 300 personnes associées à des gangsNote de bas de page 46.

4.1 Présence territoriale

La présence territoriale des gangs a beaucoup augmenté depuis quelques années, et le contrôle qu'ils exercent dans les communautés est devenu plus important. Le Bureau du protecteur des droits de la personne (Procuraduría para la Defensa de los Derechos Humanos - PDDH) a signalé que, bien que les gangs étaient pour la plupart considérés comme un phénomène urbain durant les années 1990 et au début des années 2000, à l'heure actuelle, les gangs sont présents partout au pays, y compris dans les régions rurales, où ils recrutent des jeunes et mènent leurs activités. Le directeur administratif de la Fondation Cristosal (Fundación Cristosal) a expliqué que, selon des renseignements fournis par la PNC, en ce qui a trait à la présence territoriale des gangs, il faut faire une distinction entre : [traduction] « les zones d'influence », à savoir les endroits où le gang n'est pas nécessairement présent, mais où il mène des activités dans son propre intérêt; « les zones de présence », où les membres du gang sont physiquement présents et mènent leurs activités; et « les zones de contrôle », où le gang exerce un contrôle total sur le quotidien des habitants.

Les gangs exercent leur influence sur l'ensemble du paysNote de bas de page 47. Les autorités ont perdu le contrôle des territoires au profit des gangs, car ces derniers décident qui peut entrer et sortir des quartiersNote de bas de page 48. Les gangs sont très vigilants dans le contrôle de leurs territoires et interrogent quiconque souhaite y entrerNote de bas de page 49. Selon El Faro, les habitants savent quel gang exerce son influence dans le quartier où ils vivent.

Durant la mission, plusieurs sources ont souligné que les gangs sont perçus comme étant les autorités de facto dans de nombreuses communautés. Des sources ont affirmé que le contrôle des gangs s'était profondément enraciné dans les communautésNote de bas de page 50 au point de modifier le mode de vie de nombreux SalvadoriensNote de bas de page 51. Cependant, d'après El Faro, il n'existe pas de normes homogènes au sein de ces communautés. Certaines normes demeurent tacites, bien qu'elles soient courantes. Par exemple, les gens doivent aviser les gangs de toute visite de la part d'une personne de l'extérieur du quartier afin d'éviter les problèmes, et le gang établit et surveille la procédure que doit suivre la personne quand elle arrive dans le quartier, par exemple éteindre ses phares ou utiliser les phares à longue portée, baisser les vitres des portières, ou klaxonner. Il arrive qu'une rumeur au sujet des gangs ait une incidence sur le mode de vie des résidents. Voici un exemple raconté par El Faro : une rumeur a couru selon laquelle les gangs avaient déclaré que toutes les femmes qui travaillaient au centre-ville et qui avaient teint leurs cheveux en blond seraient abattues parce que seules les conjointes des membres de gangs avaient la permission d'avoir les cheveux blonds. Le lendemain, toutes les femmes qui étaient blondes et qui n'étaient pas une conjointe d'un membre de gang ont teint leurs cheveux d'une autre couleur. [Traduction] « Personne ne savait si la rumeur était fondée ou non, mais une rumeur suffit pour que les gens modifient leur comportementNote de bas de page 52 ». D'autres agences de presse ont signalé des incidents similaires dans d'autres parties du paysNote de bas de page 53. Dans les Country Reports on Human Rights Practices for 2015 publiés par le Département d'État des États-Unis, on peut lire dans le rapport sur le Salvador que, [traduction] « [d]ans de nombreux quartiers, des groupes armés et des gangs ont ciblé certaines personnes, se sont ingérés dans leur vie personnelle, familiale et privée et ont créé un climat de peur que les autorités n'ont pas été en mesure de rétablirNote de bas de page 54 ».

Les gangs imposent couramment des couvre-feux dans les quartiers, particulièrement lorsqu'ils veulent prendre des mesures de précaution avant une attaque imminente ou lorsqu'ils se préparent à passer à l'actionNote de bas de page 55. De plus, selon le professeur Gaborit, les gangs se servent des couvre-feux et d'autres moyens pour restreindre la libre circulation des personnes - par exemple, ils donnent l'ordre d'arrêter le service d'autobus, ce qui paralyse le transport en commun -, afin de signaler au gouvernement qu'ils ont le pouvoir d'exercer un tel contrôleNote de bas de page 56. Une autre façon de contrôler le territoire est d'intercepter les gens et de leur demander de présenter leurs pièces d'identité (Documento Único de Identidad - DUI)Note de bas de page 57. Par exemple, lorsque des enseignants doivent se rendre à leur école qui se trouve dans un autre quartier, les gangs les interceptent, leur demandent de présenter leurs DUI, et les interrogent pour recueillir de l'information sur le quartier où ils habitent, l'identité des membres de leur famille et la raison de leur présence dans le quartierNote de bas de page 58. De plus, il est courant que les gangs demandent aux visiteurs et aux étrangers de présenter leurs DUI pour se renseigner sur l'endroit d'où proviennent ces personnes et les gangs qui y exercent leurs activitésNote de bas de page 59. Ils placent aussi des caméras de télévision en circuit fermé à l'extérieur de leurs quartiers pour surveiller et contrôler la circulation des personnes.Note de bas de page 60

Les chefs de gang interviennent aussi dans la communauté pour régler les conflits entre les résidents du quartierNote de bas de page 61. Des sources ont affirmé que, pour régler leurs différends avec d'autres membres de leur communauté, les habitants s'adressent habituellement au chef de gang plutôt qu'aux autoritésNote de bas de page 62. El Faro a donné l'exemple d'une femme qui s'est rendue chez le chef de gang de son quartier pour se plaindre de la violence et des mauvais traitements que lui faisait subir son époux. Le chef de gang aurait menacé l'époux et la violence à l'endroit de cette femme aurait cesséNote de bas de page 63. D'après l'explication d'El Faro, les gangs ne veulent pas que les autorités de l'État viennent dans leur quartier et préfèrent résoudre les conflits eux-mêmes au moyen de menaces de violence.

4.1.1 Frontières invisibles

La lutte pour le contrôle territorial entre les gangs crée des barrières invisibles qui constituent des frontières de facto et entravent la liberté de mouvement des habitantsNote de bas de page 64. Selon la Croix-Rouge d'El Salvador (Cruz Roja Salvadoreña), ce phénomène touche l'ensemble de la population, particulièrement les démunis, les femmes et les jeunes. D'après des sources, lorsqu'une personne habite dans un quartier contrôlé par un gang, elle ne peut passer dans le territoire sous le contrôle d'un autre gang sans courir le risque d'être abattueNote de bas de page 65. El Faro a expliqué que, par exemple, une personne qui vit dans un territoire contrôlé par un gang et qui décide de rendre visite à un ami ou à un parent dans un quartier sous le contrôle d'un gang rival risque de se faire tuer par l'un ou l'autre de ces gangs, parce que, d'une part, le gang du quartier où cette personne se rend considère comme un affront le fait qu'elle habite dans un quartier sous le contrôle de l'autre gang et, d'autre part, le gang qui contrôle le quartier où elle habite pourrait avoir des soupçons à son égard parce qu'elle a fait une visite dans le territoire du gang rival. Par conséquent, afin de se rendre au travail ou à l'école, les gens doivent prendre d'autres trajets qui leur permettent d'éviter de traverser le territoire d'un gang rival. Si une école ou un établissement d'enseignement se trouve à deux coins de rue, mais se trouve sous le contrôle d'un gang rival, l'élève ne pourra pas s'y rendre. Il y a eu des cas où des jeunes ont été abattus parce qu'ils portaient l'uniforme d'une école qui se trouvait sur le territoire d'un gang rival. De leur côté, les églises catholiques modifient le trajet de leurs processions religieuses pour éviter de traverser les territoires de gangs rivaux et, ainsi, empêcher que leurs paroissiens risquent d'être blessés ou assassinésNote de bas de page 66.

4.2 Structure

Selon El Faro, les gangs en Amérique centrale fonctionnent suivant le modèle des franchises, ce qui veut dire que, même si un gang porte le même nom, sa structure, ses mythes fondateurs, la façon dont il se perçoit et sa présence territoriale peuvent être très différents d'un pays à l'autre. Par exemple, au Salvador et au Honduras, les gangs sont présents et exercent leur influence partout sur le territoire. Toutefois, au Guatemala, le phénomène des gangs est principalement urbain, et les gangs n'ont pas réussi à établir une forte présence dans les régions autochtones rurales. À Los Angeles, où il y a environ 700 gangs latinos, les gangs sont tous subordonnés à la Mafia mexicaine (ou « la Eme »), et le phénomène des gangs dans cette région est stratifié en fonction de la race. Les gangs qui sont actives le long de la côte Est des États-Unis, particulièrement au Maryland, à Washington, en Virginie et dans l'État de New York, prennent de l'ampleur en raison de la présence de la MS salvadorienne grâce aux mouvements migratoires. La MS dans cette partie des États-Unis n'entretient pas de communications avec la MS à Los Angeles, mais elle communique avec la MS au Salvador en vue de commettre des actes d'extorsion contre les Salvadoriens qui vivent dans ces États de l'Est des États-UnisNote de bas de page 67.

Les interlocuteurs ont décrit les gangs comme étant des structures très complexesNote de bas de page 68. La structure interne des gangs est hiérarchiqueNote de bas de page 69. Selon El Faro, l'unité organisationnelle à l'échelon le plus bas de la Mara Salvatrucha est la clique (clica). Les cliques sont organisées en programas de tailles différentes et on compte 54 programas au Salvador. Dans le Barrio 18, l'unité organisationnelle à l'échelon le plus bas est la cancha, et les canchas sont organisées en tribus. L'échelon supérieur des gangs est désigné sous le nom de ranfla, et ses membres se trouvent habituellement en prisonNote de bas de page 70, car les prisons sont les centres opérationnels des gangs où se trouvent les dirigeantsNote de bas de page 71. Chaque tribu et programa gère ses propres ressources, qui proviennent principalement des activités d'extorsion; ces ressources sont consacrées aux besoins de base du gang, tels que les frais d'avocat des membres détenus, les frais médicaux des membres victimes de blessures, les indemnités aux membres de la famille des membres du gang ayant été tués ou emprisonnés, ainsi que les fonds réservés pour acheter des armes. Ils dépensent aussi de l'argent pour l'achat de produits [traduction] « de luxe » qui symbolisent leur statut et leur appartenance au gang, tels que des espadrilles Nike Cortez, et de la marijuana, particulièrement dans les prisons. Les gangs investissent aussi de l'argent dans l'achat de stupéfiants en vue de la reventeNote de bas de page 72.

Schéma : la structure des gangsNote de bas de page 73

 

[Format alternatif]
L'image illustre un graphique en deux parties représentant la structure des gangs pour Mara Salvatrucha et Barrio 18.

La structure de support est en forme de pyramide, avec les sympathisants à la base, les collaborateurs au milieu et les membres des gangs au sommet.

La structure interne des membres des gangs est la suivante : pour Mara Salvatrucha, les Clica sont au bas, les Programa au milieu et les Ranfla au sommet; pour Barrio 18, les Cancha sont au bas, les Tribu au milieu et les Ranfla au sommet.

4.3 Recrutement

Le recrutement au sein des gangs commence habituellement dès l'âge de 11 ansNote de bas de page 74, mais les gangs se servent d'enfants d'à peine 8 ans à titre de vigies (postes), qui ont pour rôle d'aviser les gangs par téléphone cellulaire lorsque des policiers ou des non-résidents pénètrent dans le quartierNote de bas de page 75. Ils se servent également d'enfants pour percevoir les paiements d'extorsionNote de bas de page 76, écouter les conversations ou effectuer d'autres tâches pour le gang en échange de quelques dollarsNote de bas de page 77. Le PDDH a de plus signalé que les gangs se servent d'enfants et de jeunes pour commettre des crimes tels le trafic de drogues, le vol, les menaces et le meurtre. Les gangs ciblent les enfants de familles démunies et de foyers brisés, les enfants qui vivent avec leurs grands-parents, les enfants ayant de la parenté aux États-Unis, ou ceux qui souffrent de problèmes psychologiques ou de déficiences mentalesNote de bas de page 78. Le recrutement se fait dans les communautés localesNote de bas de page 79 et dans les écolesNote de bas de page 80.

Pendant la mission, les sources ont exprimé des avis divergents, à savoir si le recrutement était forcé ou volontaire. Des sources ont signalé des cas où des gens auraient été contraints de collaborer avec les gangs sous peine d'être abattus ou de voir des membres de leur famille se faire tuer en guise de représaillesNote de bas de page 81. Toutefois, le Syndicat des enseignantes et enseignants de l'éducation publique du Salvador (Sindicato de Maestras y Maestros de la Educación Pública de El Salvador - SIMEDUCO) a qualifié le recrutement de [traduction] « mi-volontaire et mi-forcé », car il y a des parents qui perçoivent le gang comme un [traduction] « modèle » pour leurs enfants. Par exemple, certains parents se considèrent privilégiés qu'un membre de gang [traduction] « choisisse » leur fille de préférence à d'autres, parce qu'elle jouira d'un statut social et de meilleures conditions de vie. De plus, les enfants qui évitent de se lier avec le gang sont marginalisés, humiliés et intimidés, tandis qu'un enfant qui se lie aux membres du gang fera partie de leur cercle de protection et commencera à se bâtir une réputation au sein de la communauté. En ce sens, le recrutement est [traduction] « volontaire ». Toutefois, plus les enfants passent du temps auprès des gangs et s'impliquent avec eux, plus ils se retrouveront, plus tard, dans une situation où ils n'auront d'autre choix que de se joindre au gang, ou plus ils se sentiront obligés de s'y joindre, si bien que le recrutement est aussi, en ce sens, [traduction] « forcé »Note de bas de page 82. Selon El Faro et la Fondation pour l'étude du droit appliqué (Fundación de Estudios para la Aplicación del Derecho - FESPAD), le recrutement est [traduction] « volontaire » dans la vaste majorité des cas. De nombreux jeunes et enfants souhaitent devenir membres d'un gang parce que la participation à de telles activités est perçue comme un moyen d'accéder aux avantages économiques associés à la criminalité, car les gangs sont à la fois respectés et craints au sein de leur communautéNote de bas de page 83. Aux yeux des jeunes, les gangs leur offrent la possibilité de surmonter la pauvreté; ils admirent les gangs et leur mode de vieNote de bas de page 84 au point de verser leur sang pour le gangNote de bas de page 85. D'après El Faro, les jeunes hommes estiment que l'appartenance à un gang confère un statut social et suscite l'admiration.

Pour éviter que leurs enfants ne soient recrutés par des gangs, les parents qui en ont les moyens les inscrivent à des écoles privées. Quant aux enfants des familles qui n'en ont pas les moyens, ils sont obligés de rester à l'intérieur de la maison sans avoir la possibilité d'aller à l'école, de travailler ou de jouer dans la rue, pour éviter que les gangs ne leur fassent du malNote de bas de page 86. La Fondation Cristosal a signalé que la même situation se produit pour les familles déplacées qui arrivent dans un nouveau quartier. D'après le SIMEDUCO, la situation touche plus fréquemment les garçons que les filles.

4.3.1 Femmes et filles au sein des gangs

Selon El Faro, les femmes ne sont pas admises à titre de membres à part entière des gangs en raison des attitudes machistes qui prévalent dans la société salvadorienne, et sont également omniprésentes au sein des gangs. Les femmes étaient reconnues à titre de membres à part entière des gangs jusqu'en 2000, après quoi les gangs ont décidé de ne plus recruter de femmes parce qu'elles étaient perçues comme [traduction] « la cause de trop nombreux conflits »Note de bas de page 87. Les femmes sont considérées comme une [traduction] « propriété » par les gangsNote de bas de page 88, et elles sont utilisées à diverses fins, telles que la collecte de l'argent extorqué pour le compte des membres, la livraison de drogues dans les pénitenciersNote de bas de page 89 et l'assouvissement sexuel des membres du gang en prisonNote de bas de page 90. Si une femme ou une fille ne rend pas visite à un membre de gang emprisonné comme on lui a ordonné de le faire, ou si on la voit accompagnée d'un autre homme, elleNote de bas de page 91 ou un membre de sa familleNote de bas de page 92 sera abattuNote de bas de page 93. La FESPAD a signalé que les gangs ciblent des filles d'à peine 12 ans. De même, l'Organisation des femmes salvadoriennes pour la paix (Organización de Mujeres Salvadoreñas por la Paz - ORMUSA) a affirmé que les gangs ciblent des filles de 15 ans ou moins, et que des filles d'à peine 12 ans sont victimes de violence sexuelle. De plus, si un gang veut tuer un membre d'un gang rival et qu'il ne parvient pas à le retrouver, son épouse sera abattueNote de bas de page 94. Pour des renseignements additionnels sur la situation des femmes au Salvador, veuillez vous reporter à la deuxième partie du rapport de la mission d'étude.

4.3.2 Possibilité de quitter un gang

Selon le SIMEDUCO, les gangs peuvent autoriser un de leurs membres à quitter le groupe s'il se joint à une congrégation religieuse. Toutefois, s'il est vu par la suite en train de boire de l'alcool ou de fumer, il pourrait être assassinéNote de bas de page 95. Des sources ont affirmé que la sanction pour avoir quitté le gang est la mort, peu importe le motif du départNote de bas de page 96. De plus, comme l'a expliqué El Faro, [traduction] « il est très difficile pour un membre d'un gang de couper les liens avec les dirigeants emprisonnés parce que, tôt ou tard, il se retrouvera en prison et il aura à régler ses comptes avec le gang ».

4.4 Traits distinctifs

4.4.1 Tatouages

D'après El Faro, les gangs ont des points de vue différents à l'égard des tatouages. Par le passé, il était parfois obligatoire de se faire tatouerNote de bas de page 97; cependant, dans d'autres cas, les membres de gangs devaient mériter leur tatouageNote de bas de page 98. Généralement, les membres de gangs de 30 ans ou plus ont le corps entièrement couvert de tatouagesNote de bas de page 99. Bien que les membres des gangs aient moins recours aux tatouages depuis quelques années afin d'éviter de se faire repérer par les autorités, ils se servent également des tatouages quand ils veulent punir un membre qui a commis une erreur ou quand sa loyauté est remise en question, par exemple en lui tatouant le visage [traduction] « pour dissiper tout doute »Note de bas de page 100.

4.4.2 Style vestimentaire

Des sources affirment que, de nos jours, les membres de gangs s'habillent de façon plus discrète pour éviter d'être repérés par la PNCNote de bas de page 101. Les membres de gangs ne portent plus de vêtements amples et d'espadrilles Nike Cortez, comme ils le faisaient par le passé, mais s'habillent plutôt comme tout le mondeNote de bas de page 102. Selon El Faro, [traduction] « il n'y a pas de trait distinctif qui signale qu'une personne est membre d'un gang ». De même, la SCIS a affirmé que certains membres de gangs [traduction] « ressemblent tout à fait à des gens de la classe moyenne ». Par ailleurs, dans un article publié dans La Página, un journal de San Salvador, on peut lire que, d'après la PNC, il y a une nouvelle génération de membres de gangs qui [traduction] « s'habillent "normalement" et se posent en citoyens honnêtes et respecteux des loisNote de bas de page 103 ».

4.5 Activités

Des sources ont déclaré à la mission que les crimes commis par les gangs comprennent les homicides, l'extorsion, le recrutement forcé, les disparitions forcées, la revente de stupéfiants (narcomenudeo), les menaces et la piraterie routière.

4.5.1 Extorsion

L'extorsion constitue un problème au Salvador. Toutes les entreprises, du marchand ambulant à la société multinationale, doivent verser un pourcentage de leurs revenus, ou un [traduction] « loyer », aux gangsNote de bas de page 104. Des interlocuteurs ont fait part d'exemples d'extorsion visant des enseignants, des élèves, des sociétés de télécommunications, des municipalités, des travailleurs du secteur judiciaire, des chauffeurs d'autobus et des commerces. Les gangs pratiquent également l'extorsion contre les résidents qui reçoivent de l'argent de l'étranger et les personnes qui parviennent à décrocher un emploi mieux rémunéréNote de bas de page 105. D'après la SCIS, les gangs calculent le [traduction] « loyer » que doit verser un commerçant en chargeant un associé du gang de surveiller l'achalandage du commerce afin d'estimer les recettes qu'il génère. Habituellement, le montant du [traduction] « loyer » correspond à 20 à 30 p. 100 des revenus du commerce cibléNote de bas de page 106.

Par ailleurs, InSight Crime signale que les petites et moyennes entreprises se font extorquer de 30 à 60 millions $ US par moisNote de bas de page 107. Certaines sociétés et petites entreprises embauchent des négociateurs pour convenir des taux d'extorsion qu'elles devront payerNote de bas de page 108. D'après l'Association des sociétés salvadoriennes de transport par autobus (Asociación de Empresarios de Autobuses Salvadoreños - AEAS), la notion d'extorsion est institutionnalisée au Salvador, du fait que les entreprises et les commerces inscrivent dans leurs déclarations fiscales les sommes qui leur ont été extorquées à titre de frais d'exploitation pour [traduction] « collaboration spéciale », et que les banques tiennent compte des montants extorqués aux clients pour calculer les prêts. Dans une communication écrite envoyée à la Direction des recherches le 16 septembre 2016, El Faro a également signalé que les compagnies incluent des items comme « coûts d'opération » et « collaboration spéciale » dans leurs comptes financiers et leur déclaration de revenus officiels pour tenir compte des paiements d'extorsion.

Une des méthodes utilisées pour commettre l'extorsion consiste à envoyer une personne, habituellement d'âge mineur, chargée de remettre au propriétaire de l'entreprise ou à un des employés soit un téléphone cellulaire - un membre du gang qui est au bout du fil exigera un [traduction] « loyer » -, soit un numéro de téléphone que le propriétaire de l'entreprise devra composer, soit un bout de papier sur lequel est inscrit le montant à payer. Dans les Country Reports on Human Rights Practices for 2015 publiés par le Département d'État des États-Unis, on peut lire ce qui suit dans le rapport sur le Salvador :

[traduction]

Dans certains cas, le taux de criminalité élevé du pays a des répercussions néfastes sur les conditions de travail, ainsi que sur la santé psychologique et physique des travailleurs. Certains travailleurs, tels que les chauffeurs d'autobus, les agents de recouvrement, les messagers et les enseignants dans les secteurs à haut risque, ont signalé qu'ils sont victimes d'extorsion et de menaces de mortNote de bas de page 109.

Selon l'AEAS, si une personne refuse de se soumettre à l'extorsion, les membres du gang exerceront des représailles en tuant le propriétaire de l'entreprise ou un de ses employés ou en faisant feu sans discernement en direction de l'entreprise. El Faro a donné l'exemple d'une société de télécommunications qui s'est mise à faire appel à des sous-traitants dans les territoires sous le contrôle des gangs pour éviter de se faire extorquer de l'argent. Lorsque les gangs se sont rendu compte de la tactique, ils ont menacé de tuer les sous-traitants si la société ne payait pas les sommes exigéesNote de bas de page 110. Les gangs se livrent aussi à l'extorsion à l'endroit des cibles suivantes : les entités gouvernementales qui exécutent des projets d'infrastructure, en menaçant de tuer les travailleurs affectés au projetNote de bas de page 111; les communautés murées, en demandant au gardien de sécurité de passer le message que chaque membre de la communauté doit payer un [traduction] « loyer », sans quoi le gardien de sécurité sera assassiné; une entreprise qui souhaite installer un panneau d'affichage dans un secteur contrôlé par les gangsNote de bas de page 112; et les pêcheurs, en prélevant une partie de leurs prises, que les gangs vendront eux-mêmes au marché local4.Note de bas de page 113

Les sociétés de transport par autobus sont particulièrement touchées par l'extorsion. L'AEAS a signalé que les sociétés de transport par autobus se font extorquer de 0,25 à 1,00 $ US par jour, 50 $ US par mois ou, dans certains cas, jusqu'à 300 $ US par mois pour chaque autobus. Le prix d'un billet d'autobus est de 0,20 $ US. Le chauffeur d'autobus doit verser les sommes exigées à chacun des gangs qui contrôlent les territoires compris dans son trajet. Si la société de transport ne se plie pas à l'extorsion, les gangs ouvrent le feu sur les autobus, brûlent les véhicules, ou assassinent des chauffeurs ou des employés de la société de transport. Les chauffeurs d'autobus sont également victimes de vols et d'agressions. Pour ces raisons, certaines sociétés de transport par autobus offrent une assurance-vie à leurs employésNote de bas de page 114. D'après l'AEAS, [traduction] « au cours des dernières années », les gangs ont assassiné près de 1 000 employés et 125 propriétaires de sociétés de transport par autobus. L'AEAS a affirmé que, selon les estimations, les sociétés de transport par autobus se font extorquer plus 35 millions $ US par année. D'après un article publié dans La Prensa, un journal de San Pedro Sula, les sociétés de transport par autobus au Salvador versent près de 34 millions $ US par annéeNote de bas de page 115.

Bon nombre d'entreprises et de commerces ont fermé leurs portes à cause de l'extorsion. L'AEAS a affirmé que, sur les 40 sociétés de transport par autobus qui étaient en activité dans le passé, seulement 3 fonctionnent présentement et offrent des services dans les quartiers que les autres sociétés ont abandonnés. D'après la SCIS, les gens d'affaires continuent d'être victimes d'extorsion et de menaces même après avoir fermé leur entreprise. L'AEAS a noté qu'il est [traduction] « difficile » d'embaucher des chauffeurs d'autobus parce que le travail est très dangereux.

Les enseignants sont eux aussi victimes d'extorsion de la part des gangs; par exemple, un membre de gang en prison téléphone à un élève, qui passe le téléphone à l'enseignant, lequel reçoit l'ordre de transférer des fonds au forfait cellulaire de l'élève, de verser des sommes importantes pour régler des [traduction] « urgences » ou de remettre son propre cellulaire à l'élèveNote de bas de page 116.

4.5.2 Homicides et disparitions forcées

Selon le professeur Gaborit, le taux d'homicides chez les enfants de 16 et 17 ans est plus élevé que celui de tout autre groupe d'âge au pays. D'après le rapport de l'IML sur les homicides en 2015, sur les 6 656 homicides commis au cours de cette année, les groupes d'âge les plus touchés parmi les mineurs étaient les enfants de 17 ans (318 décès), les enfants de 16 ans (191 décès) et les enfants de 15 ans (123 décès). Chez les adultes, les groupes d'âge les plus touchés étaient les personnes de 20 ans (304 décès) et de 25 ans (273 décès)Note de bas de page 117.

Selon El Faro, les gangs se servent de la violence comme moyen de communication. Dans certains cas, les gangs veulent qu'un meurtre particulier fasse l'objet de reportages dans les médias pour que le public en soit informé. Toutefois, si la cible ou la victime n'est pas une personne très connue, le gang préférera la [traduction] « faire disparaître ». Les raisons de [traduction] « faire disparaître » quelqu'un sont, entre autres : l'infidélité d'une conjointe, un lien de parenté avec un membre d'un gang rival, le soupçon que la cible est un informateur de la PNC et le refus de se plier à l'extorsionNote de bas de page 118. Par ailleurs, dans un article publié sur le site Elsalvador.com, un journal électronique de San Salvador, on peut lire que, d'après le Bureau du procureur général (Fiscalía General de la República - FGR), les motifs de faire disparaître une personne de sexe masculin peuvent être les suivants : l'appartenance à un gang rival ou, si la personne n'appartient pas à un gang, le dépôt d'une plainte à la police, une relation avec une femme qui est la conjointe d'un membre de gang, ou encore [traduction] « le fait d'avoir des ennuis avec les gangs »Note de bas de page 119. L'article énumère aussi des motifs de faire disparaître une femme : l'infidélité, des propos malveillants au sujet de membres du gang, le refus de rendre visite à un membre du gang en prison, l'omission de déclarer toutes les recettes de la perception du [traduction] « loyer » ou de la revente de stupéfiants, ou la fréquentation de membres du gang rivalNote de bas de page 120.

D'après El Faro, dans la culture des gangs, l'assassinat d'une femme ne confère pas de [traduction] « statut » au membre du gang, ce qui explique pourquoi près de la moitié des victimes qu'on a fait disparaître et qui ont été retrouvées dans des tombes clandestines sont des femmes. Citant les autorités salvadoriennes, Elsalvador.com précise que, parmi les 172 disparitions signalées entre le 1er janvier et le 22 février 2015, 71 p. 100 des victimes étaient de sexe masculin. De plus, les mêmes autorités ont affirmé que les disparitions forcées visent plus souvent les hommes que les femmesNote de bas de page 121. D'après des statistiques fournies par El Faro, avant la trêve, il y avait environ 600 cas de disparitions, mais ce nombre a augmenté à près de 1 100 en 2013, à 2 300 en 2014, puis à 2 600 en 2015. D'après Elsalvador.com, sur la base de statistiques fournies par la PNC, en date du 31 décembre 2014, 2 392 personnes avaient été portées disparues, dont 456 ont été retrouvées vivantes et 93 ont été retrouvées mortesNote de bas de page 122.

4.5.3 Violence dans les écoles

Le niveau de violence dans les écoles est grave, et les gangs intimident les enseignants, le personnel administratif et les élèves. Selon le SIMEDUCO, de nombreux jeunes dans les écoles publiques ont des liens avec les gangs, soit directement ou par l'entremise d'un membre de la familleNote de bas de page 123. Les directeurs d'école se voient dicter par les gangs quels élèves doivent être admis à l'école et quels élèves doivent être refusés. En outre, les enseignants doivent faire preuve de prudence avant de discipliner un élève, car ils doivent souvent tenir compte du fait que l'élève peut être apparenté à un membre de gang. Le SIMEDUCO a déclaré que la plupart des enseignants qui ont été tués étaient perçus comme étant [traduction] « très stricts »Note de bas de page 124.

De plus, les élèves ayant des liens avec les gangs obligent les enseignants à cacher des armes dans leurs bureaux, au cas où les policiers se présenteraient à l'école, et à leur donner les notes qu'ils exigent. Sans fournir de précisions au sujet des coupables, le SIMEDUCO a fourni les statistiques suivantes sur les meurtres d'élèves et d'enseignants : en 2014, 38 élèves et 9 enseignants ont été tués; en 2015, 75 élèves et 15 enseignants ont été tués; et du 1er janvier au 20 avril 2016, 20 élèves et 5 enseignants ont été tués.

4.5.4 Crime organisé

En octobre 2012, le Département du Trésor des États-Unis a désigné le gang Mara Salvatrucha comme une [traduction] « organisation criminelle transnationale » en raison de ses « activités criminelles aux États-Unis et partout dans le monde » tels le trafic de personnes, le trafic de drogues, l'exploitation sexuelle, l'extorsion et les enlèvementsNote de bas de page 125. Toutefois, de l'avis d'El Faro, ces liens se limitent à certains services, tels que la prestation occasionnelle de services de gardes du corps aux barons de la drogue, l'entreposage de stupéfiants et le ravitaillement des navires qui transportent les stupéfiants. Il arrive aussi que des organisations criminelles ou des particuliers les embauchent comme tueurs à gagesNote de bas de page 126.

5. Appareil judiciaire et efficacité institutionnelle

En septembre 2014, le gouvernement a créé le Conseil national de la sécurité publique et de la coexistence (Consejo Nacional de Seguridad Ciudadanía y Convivencia - CNSCC) pour [traduction] « améliorer les politiques et les plans nationaux dans les domaines de la justice et de la sécurité publique ». Le Conseil est constitué d'organismes publics, d'administrations locales, de groupes religieux, de médias, d'entreprises privées, de partis politiques, de plusieurs organisations de la société civile et de la communauté internationale. Le CNSCC a élaboré le Plan pour un Salvador sûr (Plan Salvador Seguro), qui comporte cinq [traduction] « axes principaux » (la prévention de la violence, la poursuite criminelle et le contrôle pénal, la réadaptation et la réinsertion, l'aide aux victimes et leur protection, ainsi que le renforcement des institutions) et 124 « mesures prioritaires » pour lutter contre la violence et la criminalité, assurer l'accès à la justice et protéger les victimes d'actes criminels. Le Plan se concentre sur 50 des 262 municipalités, et les mesures prévues comprennent la promotion de l'emploi chez les jeunes, une présence accrue de l'État dans les municipalités les plus touchées et l'élargissement des plans de sécurité pour les transports collectifsNote de bas de page 127. Le vice-ministre de la Justice et de la Sécurité publique a affirmé que, dans le cadre du Plan, le gouvernement offre de la formation, des possibilités d'emploi, la scolarisation des enfants et la création [traduction] « [d']espaces communs pour la coexistence » au sein de communautés à l'échelle du pays. Il a ajouté que le gouvernement a créé des comités sur l'éducation, le logement et la santéNote de bas de page 128.

Selon le vice-ministre de la Justice et de la Sécurité publique, le gouvernement actuel offre aux jeunes une éducation, des bourses d'études et des emploisNote de bas de page 129. De plus, le gouvernement s'est doté du Plan pour des écoles sûres (Plan Escuela Segura), rebaptisé en 2013 le Plan de prévention et de sécurité pour les écoles (Plan de Prevención y Seguridad Escolar)Note de bas de page 130, qui renforce la sécurité dans les écoles salvadoriennes en déployant la PNC et les forces militaires dans les écolesNote de bas de page 131. Toutefois, le SIMEDUCO a signalé que la présence des autorités dans les écoles met en danger les élèves et les enseignants parce que ces derniers sont ciblés par les gangs, qui pensent que l'école collabore avec les autorités.

5.1 Police

La PNC compte environ 28 000 agents de policeNote de bas de page 132, dont 24 000 policiers en uniforme et 3 600 agents faisant partie de la Division des enquêtes de la PNCNote de bas de page 133. D'après l'AEAS, le salaire mensuel d'un agent de police est d'environ 250 $ USNote de bas de page 134. En 2015, des médias ont affirmé que, en moyenne, un agent de police gagne à peu près 400 $ US par moisNote de bas de page 135, mais que le salaire net revient à environ 200 $ US, une fois que les retenues ont été faitesNote de bas de page 136. L'Académie nationale de la sécurité publique (Academia Nacional de Seguridad Pública - ANSP) est responsable du recrutement au sein de la PNC. Les candidats doivent être âgés entre 18 et 28 ans et détenir un diplôme d'études secondaires; ils subissent un examen préliminaire qui comprend une vérification des antécédents judiciaires et des tests mesurant leurs aptitudes psychosociales, leur culture générale et leur état de santé. L'entraînement des recrues dure huit mois à l'ANSP. Les recrues suivent ensuite une formation additionnelle de trois mois à la PNC, où elles apprennent le maniement des armes et suivent des cours sur la déontologie, les droits de la personne, la philosophie de la police communautaire, la criminologie, et le droit et la constitution. Sans fournir de renseignements additionnels, le PDDH s'est dit d'avis que la qualité de la formation est « bonne ». Après l'embauche, le Bureau de l'inspecteur général de la sécurité publique (Inspectoría General de Seguridad Pública - IGSP) offre une séance de formation sur la conduite policière; d'une durée de 80 heures, cette formation est offerte par la division des droits de la personne de l'IGSPNote de bas de page 137.

Selon le directeur adjoint des enquêtes de la PNC, environ 500 agents en civil travaillent dans le secteur technique des enquêtes, qui englobe la collecte de preuves, l'analyse balistique, la dactyloscopie, la sérologie, l'analyse chimique et physique, et l'analyse de documents. Depuis 2007, la PNC s'est dotée d'équipement spécialisé, tel que le système intégré d'identification balistique (Integrated Ballistics Identification System - IBIS), afin de créer un registre officiel des balles et des armes à feu utilisées pour commettre des crimes. En 2009, la PNC a mis sur pied le système automatisé d'identification des empreintes digitales (Automated Fingerprint Identification System - AFIS), qui lui avait été fourni en partie par le Federal Bureau of Investigation (FBI) des États-Unis, afin de stocker les empreintes digitales des détenus. En 2012-2013, ce système a été renforcé avec l'assistance du gouvernement du Japon. Chacune des 19 directions générales de la PNC à l'échelle du pays dispose d'unités AFIS pour la collecte, l'analyse et le recoupement des empreintes digitalesNote de bas de page 138.

Selon l'IGSP, la plupart des enquêtes visant des agents de la PNC ont trait à des questions disciplinaires, par exemple parce qu'ils ont omis de se présenter au travail ou ont échoué un test de dépistage de consommation d'alcool ou de drogues. De plus, peu de plaintes sont déposées contre les agents de la PNC et, parmi les plaintes qui font l'objet d'une enquête, 38 p. 100 mènent à des sanctions. L'IGSP a un bureau dans chaque département, comptant un employé - à l'exception de six départements qui comptent [traduction] « plus d'un employé ». L'IGSP dispose d'un budget de 1,3 million $ US par année et compte 99 employésNote de bas de page 139.

Selon le PDDH, les agents de la PNC ne disposent pas de l'équipement nécessaire pour mener leurs activités. Leurs armes et leurs véhicules sont moins puissants que ceux utilisés par les organisations criminelles, et ne sont pas assez adéquats pour qu'ils puissent mener à bien leur mandatNote de bas de page 140. Par ailleurs, l'AEAS a affirmé qu'elle doit payer des enquêteurs privés pour faire enquête sur les cas d'extorsion parce que la PNC manque de ressources. Dans les Country Reports on Human Rights Practices for 2015 publiés par le Département d'État des États-Unis, on peut lire dans le rapport sur le Salvador que le manque de ressources [traduction] « a restreint l'efficacité de la PNCNote de bas de page 141 ».

Des sources signalent que les gardiens de sécurité privés sont plus nombreux que les agents de la PNCNote de bas de page 142. Dans un article paru dans La Prensa Gráfica, on peut lire que, d'après Miguel Gil, président de l'Association nationale des agences privées de sécurité (Unión Nacional de Agencias Privadas de Seguridad - UNAPS), il y a 23 546 gardiens de sécurité privés certifiés, en sus des quelque 5 000 qui travaillent sans permisNote de bas de page 143. Le professeur Gaborit a signalé qu'il y a de nombreuses agences de sécurité dont les critères d'embauche sont très laxistes et dont les employés n'ont pas reçu de formation adéquate pour faire face à [traduction] « des situations de stress intense ». D'après La Prensa Gráfica, les gardiens de sécurité privés suivent un cours ponctuel d'une durée de 40 heures offert par l'Académie nationale de la sécurité publique (Academia Nacional de Seguridad Pública - ANSP), où on leur offre une formation tactique sur le menotage, le recours aux techniques de persuasion verbale et le maniement des armesNote de bas de page 144. Le cours de l'ANSP porte aussi sur les droits du travail dans le domaine policier, les questions liées aux droits de la personne et la santé mentale4.Note de bas de page 145

La Fondation Cristosal a noté que la police communautaire n'est pas efficace parce que [traduction] « les gangs ont établi une forte présence au sein des communautés ».

 

5.1.1 Détentions arbitraires et exécutions extrajudiciaires

Durant la mission, des interlocuteurs ont dénoncé les détentions arbitraires. Selon El Faro, il arrive couramment que la PNC détienne des jeunes pendant 48 à 72 heures parce qu'elle les soupçonne d'appartenir à un gang. El Faro s'est dit d'avis que, aux yeux des autorités, le simple fait d'être un jeune suffit pour éveiller les soupçons de la PNC. El Faro a donné l'exemple d'un jeune garçon qui a été arrêté lors d'une descente policière dans son quartier et qui a été détenu par erreur. Il est en prison depuis plus de deux ans sans avoir subi de procès. La FESPAD a aussi signalé que les autorités détiennent des personnes innocentes parce qu'elles les soupçonnent d'appartenir à des gangs. Selon l'IUDOP, la PNC ne maltraite pas seulement des membres de gangs, mais aussi des membres de la communauté qui sont innocents mais que la police soupçonne d'avoir des liens avec les gangs; les policiers défoncent des portes, tabassent des gens et les mettent en détention, qui sont par la suite libérés en raison du manque de preuves incriminantes. L'IUDOP s'est dit d'avis que cela a provoqué [traduction] « l'indignation au sein des communautés, ce qui se traduit par un soutien et une légitimité accrus en faveur des gangsNote de bas de page 146 ».

Selon l'IGSP, son bureau ne reçoit pas de [traduction] « nombreuses » plaintes contre les policiers concernant des allégations de torture et, à la lumière des enquêtes menées par son bureau, aucune exécution extrajudiciaire commise par des membres de la PNC n'a été signalée. Toutefois, dans les Country Reports on Human Rights Practices for 2015, on peut lire dans le rapport sur le Salvador que les médias locaux [traduction] « ont signalé plusieurs allégations d'exécutions extrajudiciaires dans lesquelles la police aurait joué un rôleNote de bas de page 147 ». Dans ce rapport, on peut aussi lire que, en date de juillet 2015, l'IGSP signalait que [traduction] « huit agents de la PNC avaient été accusés d'homicide au cours de l'annéeNote de bas de page 148 ». Sans donner de dates précises, le PDDH a déclaré qu'environ 60 p. cent des plaintes qu'il reçoit sont des plaintes contre la PNC. Le PDDH a précisé que la plupart des plaintes ont rapport aux procédures défaillantes de la police comme la contamination des éléments de preuve, le recours excessif à la force et la violation des droits de la personne.

5.2 Système judiciaire

Le vice-ministre de la Justice et de la Sécurité publique a donné des exemples des mesures prises pour contrer les activités des gangs et des organisations criminelles. Dans les pénitenciers, il y a une [traduction] « rotation » des chefs de gang, qui sont isolés pour empêcher la communication avec leurs associés à l'extérieur des prisons et pour prévenir la perpétration et la coordination de crimes à partir des prisons. Leur accès à l'assistance juridique est [traduction] « virtuel » et les procès se déroulent par vidéoconférence. En outre, il y a davantage d'opérations conjointes de la PNC et des forces militaires afin de diminuer le nombre d'homicides, d'actes d'extorsion et d'autres crimes. On a réduit la surpopulation dans les prisons pour femmes, dont le taux d'occupation avait atteint 900 p. 100, en créant des prisons agricoles pour les délinquantes avec des enfants, où il y a des programmes tels que des ateliers de couture et des cours pour les enfantsNote de bas de page 149.

Selon des sources, le système judiciaire est inefficace et marqué par un niveau élevé d'impunitéNote de bas de page 150. Le PDDH a aussi signalé que le système judiciaire est faible et que les enquêtes ne sont pas exhaustives. D'après le Comité national de coordination des syndicats et associations des travailleurs du système judiciaire (Coordinadora Nacional de Sindicatos y Asociaciones del Órgano Judicial - CONASOJ), il y a 634 juges au Salvador, ainsi que 12 [traduction] « tribunaux spéciaux » qui instruisent- les causes ayant trait aux gangs, mais la charge de travail est si lourde qu'elle contribue à l'inefficacité du système judiciaireNote de bas de page 151. De plus, le juge en chef de la Chambre pénale de la Cour suprême de justice (Corte Suprema de Justicia, Sala de lo Penal - CSJ-SP) a précisé que les procureurs sont saisis d'environ 400 à 500 causes chacun, si bien que ces causes ne font pas toutes l'objet d'enquêtes, étant donné [traduction] « [qu']ils doivent établir des priorités ». D'après un rapport annuel préparé par le FGR, en date de mai 2016, les procureurs avaient en moyenne 358 causes chacunNote de bas de page 152. D'après ce même rapport, le FGR compte 1 031 employés judiciaires et 772 agents administratifsNote de bas de page 153. Malgré l'augmentation des homicides et des crimes, les ressources affectées aux enquêtes sur les plaintes et les crimes demeurent limitéesNote de bas de page 154. De l'avis de la CSJ-SP, les efforts en vue de s'attaquer à l'impunité sont insuffisants.

Des sources ont signalé que des juges et des avocats avaient été accusés d'avoir accepté des pots-de-vinNote de bas de page 155 et que certains procureurs et juges avaient été enrôlés par les gangsNote de bas de page 156. D'après le CONASOJ, à l'extérieur des palais de justice, des sacadores (avocats qui offrent leurs services pour sortir quelqu'un de prison) exigent entre 10 000 et 20 000 $ US, apparemment de connivence avec des juges, pour faire libérer une personne de prison. L'AEAS a expliqué que, par exemple, lorsqu'un membre de gang est détenu, le gang recueille entre 10 000 et 15 000 $ US au moyen d'extorsion à l'endroit de sociétés de transport par autobus afin de payer l'avocat qui pourra obtenir la libération du membre détenu.

Selon le PDDH, environ 5 à 7 p. 100 des plaintes déposées auprès des autorités ont mené à des condamnations. La Fondation Cristosal a signalé que, au cours des 5 dernières années, les autorités ont reçu près de 120 000 plaintes. Sur les 40 000 plaintes qui se sont rendues à l'étape du procès, un verdict a été rendu dans 6 000 causes et une sentence a été prononcée dans 2 000 de ces causesNote de bas de page 157. D'après le rapport annuel du FGR, parmi les plaintes déposées auprès des autorités entre juin 2015 et mai 2016, les procureurs ont ouvert 94 338 dossiers, mettant en cause 115 152 accusésNote de bas de page 158. Durant la même période, le système judiciaire a instruit 42 694 affaires, mettant en cause 65 292 accusés, dont 8 997 ont été déclarés coupables et 2 423 ont été acquittésNote de bas de page 159. La FESPAD a ajouté que, après avoir reçu des menaces, certains juges évitent les affaires ayant trait aux gangs et laissent l'instruction de ces causes à un juge suppléant.

Selon des sources, les gens préfèrent ne pas déposer de plaintes auprès des autorités par crainte de représaillesNote de bas de page 160 ou en raison d'un manque de confiance envers les institutions publiques qui reçoivent les plaintesNote de bas de page 161. L'IGSP a signalé des cas isolés de collusion entre des agents de la PNC et les gangs. Selon d'autres sources, si une personne dépose une plainte contre un gang ou un membre de gang, elle subira vraisemblablement des représailles, car les gangs ont infiltré de nombreuses institutions publiques, y compris la PNCNote de bas de page 162. L'AEAS a signalé que les gangs ont recours au chantage et aux menaces pour contraindre les policiers à leur transmettre de l'information. Des sources ont aussi affirmé que les gangs surveillent les postes de police au moyen de caméras posées clandestinement dans des arbres près de ces postes afin de savoir qui se rend aux postes de police. Voilà pourquoi de nombreuses personnes choisissent de ne pas porter plainte à la policeNote de bas de page 163. Des sources notent que les gens qui portent plainte auprès des autorités sont stigmatisés dans leurs communautés et sont considérés comme des [traductions] « traîtresses »Note de bas de page 164 ou sont assassinésNote de bas de page 165.

Les enquêtes sur l'extorsion ont, elles aussi, des carences. D'après l'AEAS, les policiers disent souvent aux victimes [traduction] « [qu']il est préférable de verser le pourcentage exigé que de se faire tuer ». De l'avis du SIMEDUCO, lorsque le syndicat aide des enseignants qui sont victimes d'extorsion à déposer des plaintes auprès des autorités, la réponse des autorités est inadéquate. Un fort pourcentage d'enseignants sont visés par des actes d'extorsion, mais bon nombre d'entre eux ne portent pas plainte par crainte de représailles de la part des gangs. Il a été signalé que des représentants du ministère de l'Éducation avisent les enseignants [traduction] « [qu']il est préférable de bien s'entendre avec les membres de gangs et de payer les montants exigés pour éviter de se faire tuerNote de bas de page 166 ».

Selon le professeur Gaborit, dans la majorité des homicides, aucune enquête n'est menée et il n'y a pas de procès; de plus, parmi les cas qui mènent à un procès, seule une minorité se solde par un verdict. L'APES a signalé que le FGR n'effectue pas d'enquête approfondie, particulièrement dans les affaires liées aux gangs; les procureurs concluent souvent qu'il s'agit d'un [traduction] « crime lié aux gangs » et le dossier est clos. De même, la CSJ-SP a signalé que, lorsque les autorités estiment qu'un crime a été commis par un gang, il « semble que la pratique non officielle consiste à ne pas mener d'enquête ». La CSJ-SP a également ajouté qu'à cause du grand nombre d'homicides commis partout au pays, la capacité de faire enquête du système judiciaire est submergée « tant sur le plan de la qualité que celui de la quantité ». D'après la Croix-Rouge d'El Salvador, les autorités manquent de diligence dans les enquêtes sur les crimes parce qu'elles sont débordées et ne disposent pas de ressources adéquates pour intervenir. Selon l'interlocuteur, [traduction] « il est très inhabituel qu'une plainte fasse l'objet d'une enquête exhaustive ». La Croix-Rouge a donné l'exemple d'une femme qui s'est rendue à un poste de la PNC pour signaler la disparition de sa fille de 14 ans. Quatre policiers ont mené l'entrevue [traduction] « dans un climat [que la plaignante a] jugé peu accueillant » et, lorsqu'elle est retournée au poste de la PNC pour se renseigner sur l'état d'avancement de sa plainte, les policiers, irrités par ses visites, lui ont demandé : [traduction] « Pourquoi la cherches-tu encore? Elle est déjà morteNote de bas de page 167 ».

Les conditions de travail des employés judiciaires au Salvador sont mauvaises. Des sources affirment que des officiers de justice chargés de remettre des sommations ou des avis de convocation du tribunal se sont fait tabasser ou voler dans les communautés contrôlées par des gangs. Il y a également des situations où les gangs empêchent les officiers de justice d'entrer sur leur territoire, les obligeant à payer un membre de gang pour être en mesure de signifier l'assignationNote de bas de page 168. Selon la CSJ-SP, l'officier de justice doit demander la permission ou l'aide des centres communautaires afin d'entrer dans certains quartiers. Le CONASOJ a affirmé que, à cause de ce problème, près de 26 p. 100 des assignations ne peuvent être remises en mains propres à la partie convoquée. Quand une assignation doit être signifiée à une personne qui habite dans un secteur où l'officier de justice ne peut se rendre, le tribunal a recours à d'autres moyens, comme le téléphone, le courriel ou l'affichage, à l'extérieur de la mairie, d'avis publics contenant les noms des personnes convoquées. Près de 6 p. 100 des dossiers sont clos parce qu'il n'a pas été possible de signifier une assignationNote de bas de page 169.

De plus, les techniciens judiciaires chargés de recueillir les corps des victimes décédées doivent parfois payer un [traduction] « loyer » d'environ 5 $ US ou donner des cigarettes ou des bouteilles d'alcool pour entrer sur le terrain contrôlé par un gang afin de récupérer les corps. Les coroners travaillent jusqu'à 48 heures par semaine et, lorsqu'ils finissent de travailler tard le soir, ils doivent passer la nuit à l'IML parce qu'il serait trop dangereux d'effectuer le trajet vers leur quartier à une telle heure. Les gangs menacent également les psychologues, les travailleurs sociaux, les éducateurs et les agents de probation quand ceux-ci entrent dans les communautés sous le contrôle des gangsNote de bas de page 170. D'après le CONASOJ, la raison pour laquelle les membres de gangs ne permettent pas aux travailleurs judiciaires d'entrer sur leur territoire est que ces derniers sont perçus comme étant des agents de la PNC. Selon la CSJ-SP, [traduction] « ces travailleurs vivent sous une menace constante ».

5.3 Witness Protection Program

Le programme de protection des témoins, qui est dirigé par l'Unité technique exécutive (Unidad Técnica Ejecutiva - UTE), est mis à la disposition des victimes et des témoins d'actes criminels uniquement durant l'étape du procès, après quoi la personne n'a plus droit à la protection du gouvernementNote de bas de page 171. Selon le PDDH, il n'existe aucun autre programme lorsque les témoins quittent le programme de protection. Pour avoir accès au programme, la personne doit avoir une recommandation du FGRNote de bas de page 172. Le vice-ministre de la Justice et de la Sécurité publique a signalé que, en raison du manque de ressources, la protection n'est offerte que durant la tenue du procès. Il a ajouté, sans fournir de précisions additionnelles, que l'UTE aide des victimes ou des témoins à quitter le pays dans certains cas, mais que les fonds disponibles pour de telles initiatives sont restreintsNote de bas de page 173.

Selon des sources interviewées dans le cadre de la mission, le programme comporte de nombreuses lacunes. D'après la Croix-Rouge d'El Salvador, le programme ne garantit pas la vie des témoins. Des sources affirment que certains témoins et victimes d'actes criminels qui étaient inscrits au programme de protection des témoins continuent de recevoir des menacesNote de bas de page 174, et que certains témoins qui bénéficient présentement de cette protection ont été la cible de menaces et d'agressionsNote de bas de page 175. On a fait état de nombreux cas de témoins protégés qui ont été assassinésNote de bas de page 176. Certains témoins protégés sont placés dans des [traduction] « résidences protégées » (casas de seguridad ou casas seguras), où il y a eu des cas de mauvais traitements infligés par des gardiensNote de bas de page 177. Les agents du gouvernement ne sont pas admissibles au programme de protection, et leurs conjoints et enfants sont la cible de menacesNote de bas de page 178. Pour des renseignements additionnels sur le programme de protection des témoins, veuillez consulter la réponse à la demande d'information SLV105258 en date du 1er septembre 2015.

6. Déplacements à l’intérieur du pays (déplacement interne)

Le déplacement à l'intérieur du pays (déplacement interne) est un problème qui prend de l'ampleurNote de bas de page 179. Des sources ont déclaré que le déplacement interne forcé n'est pas reconnu par l'ÉtatNote de bas de page 180. Selon l'APES, ce phénomène est pris en compte seulement si un grand groupe de personnes est déplacé, mais pas s'il s'agit de déplacements individuels. D'après un rapport de l'Internal Displacement Monitoring Centre - IDMC, à la fin de 2014, il y avait 288 900 personnes déplacées à l'intérieur du paysNote de bas de page 181, Note de bas de page 182. Par contre, selon le professeur Gaborit, le déplacement interne est un phénomène qui n'a pas été étudié de manière approfondie, et son ampleur est inconnue. Il s'est aussi dit d'avis que le déplacement interne avait été exagéré et [traduction] « [qu']il n'y a certainement pas plus de 100 000 personnes déplacées, comme le suggèrent certaines études ». L'Institut des droits de la personne de l'Université centraméricaine José Simeón Cañas (Instituto de Derechos Humanos de las Universidad Centramericana "José Simeón Cañas" - IDHUCA) a affirmé avoir répertorié 30 cas de déplacement interne entre le 1er janvier et le 20 avril 2016.

Le déplacement interne est principalement attribuable aux gangsNote de bas de page 183. Il est aussi le fruit d'interventions de la PNC et de l'arméeNote de bas de page 184. Des sources ont signalé que les victimes de déplacement [traduction] « gardent le secret » sur leur situation pour éviter d'être à nouveau victimesNote de bas de page 185. Bien que certaines églises offrent un refuge aux personnes déplacées à l'intérieur du pays, les personnes touchées qualifient leur situation de [traduction] « confinement », car les personnes déplacées doivent assurer leur propre protection et ne doivent pas quitter l'église, de crainte d'être repérées par leurs persécuteursNote de bas de page 186.

Certaines personnes ayant été expulsées de l'étranger sont contraintes de déménager ailleurs au pays à leur retour au Salvador. Sans fournir d'autres renseignements, le PDDH a signalé que les jeunes qui sont expulsés au Salvador risquent d'être à nouveau victimes des gangs à leur retour au pays. Selon la Fondation Cristosal, à leur arrivée dans leur communauté, ces personnes sont interrogées par les gangs. Le professeur Gaborit a signalé que de nombreux expulsés sont en déplacement constant, déménageant [traduction] « deux ou trois fois dans le seul but d'accumuler assez d'argent pour quitter à nouveau le pays ».

Le déplacement interne est [traduction] « difficile » au Salvador en raison des liens très serrés qui existent dans les communautés, où tout le monde se connaîtNote de bas de page 187. Selon l'ALDES, la réinstallation des gens qui fuient les gangs est [traduction] « très difficile », car la portée de ces organisations fait en sorte qu'elles sont en mesure de retracer une personne partout au pays. D'après des sources, quand une personne déménage d'une communauté à une autre, elle fait l'objet d'une enquête par le gang qui contrôle ce nouvel endroitNote de bas de page 188. Lorsqu'une personne déménage d'une communauté dominée par un gang vers une communauté dominée par le même gang, la clique de ce nouvel endroit recueille de l'information sur cette personne à des fins de vérification auprès de la clique du lieu d'origineNote de bas de page 189. Par ailleurs, si la personne déménage dans un territoire contrôlé par un autre gang, elle risque d'être assassinéeNote de bas de page 190. Selon la Fondation Cristosal, il s'agit d'un mécanisme que les communautés utilisent pour [traduction] « se protéger contre les étrangers ». Le professeur Gaborit a expliqué que les gangs ont de solides réseaux de communication, dont un vaste réseau pour espionner et échanger des renseignementsNote de bas de page 191. Des sources affirment que les gangs recueillent de l'information de diverses manières, y compris au moyen de leurs activités légales - entreprises, commerces et stations de lavage de voitures - à l'intérieur du quartierNote de bas de page 192. Ils infiltrent aussi des compagnies, des centres d'appels et des supermarchésNote de bas de page 193. Les gangs sont en mesure de découvrir, en peu de temps, à quel endroit une personne déplacée s'est établieNote de bas de page 194. Selon l'IGSP, le déplacement des victimes et des personnes témoins d'actes criminels à l'intérieur du pays est possible au Salvador; cependant, si l'organisation qui est à la recherche d'une personne est déterminée à la retrouver, [traduction] « il est fort probable que cette personne sera retrouvée ».

6.1 Accès à l'éducation, aux soins de santé et à l'emploi

La Croix-Rouge d'El Salvador a expliqué que son organisation offre un soutien psychologique aux victimes d'actes criminels parce que les institutions publiques ont des lacunes à cet égard. Elle offre également une assistance juridique. Toutefois, il est difficile d'effectuer un suivi auprès des personnes déplacées, car elles font l'objet de menaces ou sont obligées de déménager. Certaines institutions publiques offrent des services juridiques et un soutien psychologique, mais seulement durant la période de [traduction] « crise », et elles n'assurent pas de suivi de ces dossiers. De 2013 à février 2016, la Croix-Rouge est venue en aide à 370 victimes d'actes criminelsNote de bas de page 195.

Les enfants d'âge scolaire des familles qui ont été déplacées ne fréquentent pas l'école, car les gangs contrôlent de nombreuses écoles, les surveillent ou y sont présents; de plus, les gangs recueillent apparemment des renseignements sur les nouveaux élèvesNote de bas de page 196. Dans de nombreux cas, les parents préfèrent garder les enfants à la maison en tout temps pour éviter d'être à nouveau cibléesNote de bas de page 197. L'accès aux soins de santé est également un problème pour les personnes déplacées, en raison des restrictions de mouvement causées par leur déménagement d'un quartier à un autreNote de bas de page 198.

Selon la Croix-Rouge d'El Salvador, des employeurs et des entrepreneurs ont pour politique de ne pas embaucher de gens provenant de communautés qui sont en difficulté ou qui constituent des [traduction] « points chauds »Note de bas de page 199. Durant le processus d'embauche, certaines entreprises exigent que les candidats provenant des communautés contrôlées par des gangs, particulièrement les jeunes, se soumettent à un test polygraphique et enlèvent leurs vêtements pour prouver qu'ils n'ont pas de tatouages ou de liens avec les gangsNote de bas de page 200.

Notes sur les interlocuteurs

  • Asistencia Legal para la Diversidad Sexual de El Salvador - ALDES (Assistance juridique pour la diversité sexuelle du Salvador (LGBTI Justice Clinic) (Clinique juridique LGBTI))
  • L'ALDES est une ONG établie à San Salvador qui œuvre en faveur de « la santé, de la sécurité, de la dignité et des droits de la communauté des lesbiennes, homosexuels, bisexuels, transgenres et intersexuées (LGBTI) au Salvador par l'autonomisation juridique des personnes LGBTI ». Le 18 avril 2016, la Direction des recherches a mené une entrevue téléphonique avec une avocate de l'ALDES, madame Ana Montano.

  • Asociación de Empresarios de Autobuses Salvadoreños - AEAS (Association des sociétés salvadoriennes de transport par autobus)
  • L'AEAS est une organisation de sociétés de transport par autobus qui assurent le transport public dans 262 municipalités dans l'ensemble du pays. Le 14 avril 2016, la mission conjointe a rencontré le président, Genaro Ramírez, et le directeur des relations avec les associations de transport en commun, Alfredo Villareal.

  • Asociación de Periodistas de El Salvador - APES (Association des journalistes du Salvador)
  • L'APES est un organisme sans but lucratif et apolitique qui a été fondé en 1936. Il représente des journalistes et des universitaires qui se spécialisent dans le journalisme. Le 18 avril 2016, la Direction des recherches a tenu une réunion avec le président, Serafín Valencia.

  • Coordinadora Nacional de Sindicatos y Asociaciones del Órgano Judicial - CONASOJ (Comité national de coordination des syndicats et associations des travailleurs du système judiciaire)
  • Le CONASOJ est une organisation qui chapeaute 10 organisations et qui défend les droits des travailleurs du système judiciaire. Le 12 avril 2016, la mission conjointe a rencontré le coordonnateur national, Roswal Solórzano.

  • Corte Suprema de Justicia, Sala de lo Penal - CSJ-SP (Cour suprême de justice, Chambre pénale)
  • La CSJ-SP entend les appels des décisions rendues en matière pénale à l'égard de personnes ayant fait l'objet d'une condamnation en deuxième instance par le tribunal pénal de district. Parmi les autres fonctions exercées par la Cour, mentionnons le soutien à la modernisation du système judiciaire et la présidence du conseil d'administration de l'Institut de médecine légale (Instituto de Medicina Legal - IML). Le 14 avril 2016, la mission conjointe a rencontré la juge en chef de la CSJ-SP, madame Doris Luz Rivas Galindo.

  • Cruz Roja Salvadoreña (Croix-Rouge D'El Salvador)
  • La Croix-Rouge d'El Salvador offre une assistance aux victimes de catastrophes naturelles, de situations d'urgence nationales et de violations des droits de la personne. Il y a deux ans, elle a lancé un projet visant à aider les victimes de violence avec le soutien de la Croix-Rouge espagnole et de l'Union européenne. Elle fournit également de l'aide aux personnes déplacées et assure une coordination avec d'autres entités pour venir en aide aux victimes de violence fondée sur le sexe. Le 19 avril 2016, la Direction des recherches a rencontré la coordonnatrice de l'unité pour l'assistance aux victimes de violence sociale.

  • El Faro
  • El Faro est un journal électronique de La Libertad qui mène des enquêtes sur des questions telles que la corruption, le crime organisé, la migration, la culture et les droits de la personne. Carlos Martínez, journaliste et fondateur d'El Faro, a effectué des recherches, au cours des cinq dernières années, sur les gangs au Salvador et, dans une certaine mesure, au Guatemala. Le 14 avril 2016, la mission conjointe a réalisé une entrevue avec Carlos Martínez, journaliste et fondateur, avec Daniel Valencia, rédacteur en chef, et avec Fred Ramos, photojournaliste. Le 16 septembre 2016, la Direction des recherches a reçu de la correspondance additionnelle de la part de Carlos Martínez.

  • Fundación Cristosal (Fondation Cristosal)
  • La Fondation Cristosal est une organisation épiscopale indépendante et sans but lucratif qui travaille sur des questions liées au déplacement forcé dû à la violence et à la protection des victimes. Le 11 avril 2016, la mission conjointe a rencontré l'agente en chef des programmes, Celia Medrano.

  • Fundación de Estudios para la Aplicación del Derecho - FESPAD (Fondation pour l'étude du droit appliqué)
  • La FESPAD est une organisation vouée à la promotion de l'édification d'un État constitutionnel et démocratique et de la primauté du droit. Elle œuvre également en faveur de la protection des droits de la personne fondés sur la dignité, la liberté et l'égalité, par la connaissance et l'application du droit, et contribue au développement de sociétés justes et démocratiques. L'organisation se consacre à la défense des droits du travail, à la justice pénale ainsi qu'à la prévention de la violence contre les enfants, les jeunes, les femmes et les personnes LGBTI. Le 19 avril 2016, la Direction des recherches a rencontré le directeur exécutif, Abraham Abrego.

  • Inspectoría General de Seguridad Pública - IGSP (Bureau de l'inspecteur général de la sécurité publique)
  • L'IGSP est l'organisme chargé de superviser la Police nationale civile (PNC) et l'Académie nationale de la sécurité publique (Academia Nacional de Seguridad Pública - ANSP). Le bureau travaille sous l'autorité du ministre de la Justice et de la Sécurité publique. Le 11 avril 2016, la mission conjointe a rencontré l'inspecteur général, Tito Edmundo Zelada Mejía.

  • Instituto de Derechos Humanos de la Universidad Centroamericana "José Simeón Cañas" - IDHUCA (Institut des droits de la personne de l'Université centraméricaine José Simeón Cañas)
  • L'IDHUCA a été créé en 1985 par le prêtre Segundo Montes Mozo dans le but d'entreprendre des recherches sur la situation des réfugiés salvadoriens et de faire la promotion des droits de la personne au pays. L'IDHUCA mène des recherches et des enquêtes sur les violations graves des droits de la personne, et il plaide en faveur de l'efficacité du système de justice. Le 11 avril 2016, la mission conjointe a rencontré les membres de l'équipe de travail sur la justice transitoire, Mirla Carvajal et Pedro Martínez.

  • Instituto Universitario de Opinión Pública - IUDOP (Institut universitaire de l'opinion publique), Universidad Centroamericana "José Simeón Cañas" (Université centraméricaine José Simeón Cañas)
  • L'IUDOP est un institut faisant partie de l'Université centraméricaine José Simeón Cañas qui réalise des sondages d'opinion et mène des études sur la victimisation, la sécurité, les exécutions sommaires, l'efficacité institutionnelle et le système de justice. Le 20 avril 2016, la Direction des recherches a rencontré la directrice, Jeannette Aguilar Villamariona.

  • Mauricio Gaborit, professeur de psychologie sociale, Université centraméricaine José Simeón Cañas
  • Le professeur Gaborit est un spécialiste en matière de violence, de cognition sociale, de genre et de mémoire historique. Il a publié de nombreux articles sur ces sujets, ainsi que sur la migration en Amérique centrale. Il a notamment publié l'article « Recalibrando la mirada al pasado: Reconciliación y perdón en el posconflicto » [Nouveau regard sur le passé : réconciliation et pardon dans le contexte de l'après-guerre], paru dans Estudios Centroamericanos (2015), l'article « Psychological Homelessness and Enculturative Stress among US-Deported Salvadorans: A Preliminary Study with a Novel Approach », paru dans Journal of Immigrant and Minority Health (2014), ainsi que le livre La esperanza viaja sin visa: Jóvenes y migración indocumentada de El Salvador, publié en 2012. La Direction des recherches a rencontré le professeur Gaborit le 21 avril 2016.

  • Ministerio de Relaciones Exteriores de El Salvador, Viceministerio para los Salvadoreños en el Exterior, Dirección General de Vinculación con Salvadoreños en el Exterior (ministère des Affaires étrangères du Salvador, vice-ministère des Salvadoriens à l'étranger, Direction générale des relations avec les Salvadoriens à l'étranger)
  • Le vice-ministère des Salvadoriens à l'étranger est responsable du renforcement des liens sociaux, économiques, culturels et politiques avec les Salvadoriens qui vivent à l'étranger; il est aussi chargé de promouvoir la protection de leurs droits et de leur famille. Le 19 avril 2016, la Direction des recherches a rencontré le directeur responsable du suivi et de la réinsertion des Salvadoriens de retour dans leur pays, Daniel Enrique Ortiz, et la directrice de l'assistance et de la protection des droits de la personne, Ana Irma Rodas.

  • Organización de Mujeres Salvadoreñas Por la Paz - ORMUSA (Organisation des femmes salvadoriennes pour la paix)
  • L'ORMUSA est une organisation féministe qui promeut l'égalité des sexes ainsi que l'autonomisation économique, sociale et politique des femmes. L'un des domaines dans lesquels œuvre l'ORMUSA est la sécurité publique et, en conséquence, elle dispose d'un observatoire national qui recueille des renseignements concernant la violence à l'égard des femmes. Le 12 avril 2016, la mission conjointe a rencontré la directrice, Janneth Urquilla, et une représentante, Silvia Juárezis.

  • Policía Nacional Civil, Subdirección de Investigaciones (Police nationale civile, Bureau du directeur adjoint des enquêtes)
  • Le 21 avril 2016, la Direction des recherches a rencontré le directeur adjoint, Juan Carlos Martínez.

  • Procuraduría para la Defensa de los Derechos Humanos - PDDH (Bureau du protecteur des droits de la personne)
  • Le PDDH est une institution indépendante qui fait partie du ministère public (Ministerio Público). Le bureau est chargé de l'éducation aux droits de la personne ainsi que de la protection et de la promotion de ces droits. Le 11 avril 2016, la mission conjointe a réalisé une entrevue avec l'adjointe au protecteur des droits civils et politiques, Sandra Rivera.

  • Sindicato de Maestras y Maestros de la Educación Pública de El Salvador - SIMEDUCO (Syndicat des enseignants et enseignantes de l'éducation publique du Salvador)
  • SIMEDUCO est le syndicat des enseignants dans le secteur public qui défend les droits politiques, économiques, sociaux et culturels de ses membres. Le 20 avril 2016, la Direction des recherches a rencontré le secrétaire général, Francisco Zelada, et la secrétaire des relations nationales et internationales, Marisol Galdámez.

  • Sociedad de Comerciantes e Industriales Salvadoreños - SCIS (Société des commerçants et des industriels salvadoriens)
  • La SCIS représente les entreprises et les industries établies au Salvador. Le 21 avril 2016, la Direction des recherches a rencontré le président, Víctor Rodríguez, le secrétaire, José Ángel Reyes, et le directeur, William Pereira.

  • Viceministerio de Justicia y Seguridad Pública (vice-ministère de la Justice et de la Sécurité publique)
  • Le 20 avril 2016, la Direction des recherches a rencontré le vice-ministre, Luis Roberto Flores.

Références des sources imprimées

Aguilar Villamariona, Jeannette. 2006. « Los efectos contraproducentes de los Planes de Mano Dura ». Quórum. No 16. 81-94.

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Wilkinson, Michael. 2008. « Security and Democracy in El Salvador: An Undeniable Connection ». Stanford Journal of International Relations. Vol. X, no 1.

Annexe

Mandat

  1. Témoins de la criminalité et de la corruption
    1. Mesure actuelle par laquelle les personnes dénoncent la corruption de la police ou signalent avoir été témoins d’un crime commis par un gang criminel, notamment en matière de trafic de stupéfiants, d’enlèvements et de méfaits commis dans le secteur public :
      1. statistiques à l’échelle nationale, étatique et locale;
      2. cadre législatif : à l’échelle nationale et étatique.
    2. Efficacité de l’aide apportée par le gouvernement et la police aux personnes qui sont témoins d’actes répréhensibles commis par la police ou d’une activité criminelle :
      1. mesures de protection policière; existence éventuelle d’une unité de police spéciale pour enquêter sur ce type de crimes; existence et efficacité des mesures de protection à l’échelle nationale, étatique et locale;
      2. accessibilité au système de justice : procédure concernant les plaintes; à savoir si la question de la protection des témoins et dénonciateurs est abordée; mesures prises par la police à la suite de plaintes; processus judiciaire pour ce type de plaintes (p. ex., s’il y a des ordonnances de protection des témoins et dans quelle mesure elles sont appliquées);
      3. existence d’une formation spéciale destinée aux membres des services de police et du système judiciaire pour traiter les dossiers relatifs à la protection des témoins;
      4. à savoir si les mesures prises par la police à l’égard des témoins sont évaluées, et quels sont les résultats;
      5. existence, portée et efficacité des programmes de protection des témoins.
    3. Capacité des victimes à se réinstaller ailleurs au pays :
      1. capacité à fuir l’agresseur sans être retrouvé (p. ex., niveau de risque et facteurs socioéconomiques);
      2. accessibilité aux bases de données pour retrouver une victime (p. ex., registres scolaires, etc.); quels sont les principaux registres nationaux et quelles cartes d’identité sont délivrées par le gouvernement; quelles autorités ont accès à ces registres et dans quelle mesure; niveau de sécurité associé à la protection de ces bases de données; systèmes de surveillance en place à l’échelle nationale et étatique;
      3. niveau de communication entre les organismes d’application de la loi à l’échelle locale, étatique et fédérale;
      4. cas connus de victimes retrouvées par des agents de persécution.
  2. Gangs
    1. Structure des gangs les plus importants
      1. division hiérarchique des gangs les plus importants dans leur ensemble et comme clans; importance de la communication entre les dirigeants et les clans et au sein des clans; comment les ordres sont transmis et exécutés;
      2. rôle des femmes dans les maras;
      3. nombre de clans et de membres.
    2. Recrutement
      1. méthodes de recrutement; à savoir si elles ont changé après la mise en application des politiques dites mano dura; population cible (âge, sexe, classe sociale, etc.);
      2. processus d’initiation et pratiques permettant d’obtenir une promotion au sein du groupe;
      3. information sur la manière de quitter un gang; traitement des anciens membres de gang ou des personnes qui essaient d’en sortir; information au sujet d’anciens membres de gang (également appelés calmados); à savoir s’ils sont encore actifs ou collaborent toujours avec les gangs.
    3. Lieux où les gangs exercent leurs activités
      1. division territoriale des gangs et des clans; comment les divisions territoriales sont établies (rifa del barrio);
      2. conflits entre les clans et les gangs aux fins de l’appropriation d’un territoire;
      3. présence dans les régions rurales.
    4. Activités nationales/transnationales
      1. activités criminelles locales : enlèvement, extorsion, homicides; statistiques;
      2. activités internationales : trafic de stupéfiants, tueurs à gages; statistiques;
      3. à savoir si les gangs peuvent être considérés comme des syndicats du crime organisé transnational; relations avec les cartels de la drogue et d’autres regroupements de crime organisé;
      4. capacité à fuir les gangs sans être retrouvé; portée de leurs activités à l’échelle nationale et transnationale.
    5. Efforts de l’État
      1. cadre législatif;
      2. unités de lutte contre les gangs : à savoir s’il existe une unité de police spéciale pour lutter contre les gangs et enquêter sur les crimes commis par ces derniers; information sur l’efficacité, la formation et les ressources; cas de corruption ou d’utilisation excessive de la force; à savoir si leur efficacité est évaluée; statistiques sur les arrestations;
      3. accessibilité au système de justice : procédure concernant les plaintes; mesures prises par la police à la suite de plaintes; processus judiciaire pour ce type de plaintes; statistiques sur les accusations, condamnations et peines d’emprisonnement;
      4. programmes de protection de l’État : existence, portée et efficacité des programmes de protection des témoins; à savoir si la question de la protection des victimes, des témoins et des anciens membres de gang est abordée; accessibilité aux bases de données pour retrouver une victime; niveau de sécurité appliqué par les autorités pour protéger ces bases de données; cas connus de victimes retrouvées.
  3. Violence envers les femmes
    1. Ampleur de la violence fondée sur le sexe, notamment de la violence familiale, du harcèlement sexuel et de la violence (y compris le viol) ainsi que de la traque;
      1. statistiques à l’échelle nationale, étatique et locale;
      2. cadre législatif; nouveaux développements à l’échelle nationale ou étatique.
    2. Efficacité des services de police et du système judiciaire dans la lutte contre la violence fondée sur le sexe :
      1. casiers judiciaires; arrestations et plaintes; nombre de personnes accusées ou arrêtées pour avoir commis des crimes fondés sur le sexe (ainsi qu’il est décrit à la section a); nombre de personnes reconnues coupables; durée de la peine d’emprisonnement (si la personne est déclarée coupable); nombre de personnes libérées;
      2. mesures de protection de la police; à savoir s’il existe des unités de police spéciales qui enquêtent sur ce type de crimes; ordonnances de protection et exécution;
      3. accessibilité au système de justice : procédure concernant les plaintes; mesures prises par la police à la suite de plaintes; processus judiciaire pour ce type de plaintes (p. ex., ordonnances de protection);
      4. à savoir s’il existe une formation spéciale destinée aux membres des services de police et du système judiciaire pour traiter les cas de crimes fondés sur le sexe;
      5. à savoir si les mesures prises par la police pour lutter contre la violence fondée sur le sexe sont évaluées par des organismes gouvernementaux.
    3. État du réseau de refuges d’urgence :
      1. nombre de refuges gérés par le gouvernement qui sont en activité et capacité de chacun de ces refuges (p. ex., nombre de lits par refuge, personnel qualifié);
      2. accessibilité et durée de séjour autorisée;
      3. possibilités offertes à la personne qui quitte le refuge; à savoir si les services sociaux font un suivi auprès de la victime.
    4. Capacité des victimes à demander se réinstaller ailleurs au pays :
      1. capacité de la victime à fuir l’agresseur sans être retrouvée (p. ex., niveau de risque et facteurs socioéconomiques);
      2. accessibilité aux bases de données pour retrouver une victime (p. ex., registres scolaires, etc.); quels sont les principaux registres nationaux et quelles cartes d’identité sont délivrées par le gouvernement; quelles autorités ont accès à ces registres et dans quelle mesure; niveau de sécurité associé à la protection de ces bases de données; systèmes de surveillance en place à l’échelle nationale et étatique;
      3. cas connus de victimes retrouvées par des agents de persécution.
  4. Orientation sexuelle
    1. Traitement réservé par la société; ampleur de l’homophobie, de la discrimination et du harcèlement contre les membres de la communauté des lesbiennes, gais, bisexuels et transgenres (LGBT) :
      1. statistiques sur la violence homophobe ou les crimes haineux : à l’échelle nationale, étatique et locale;
      2. incidents de violence homophobe contre les membres de la communauté LGBT (généralisés, peu élevés, pas suffisamment signalés, etc.);
      3. types de préjudices subis par les membres de la communauté LGBT (p. ex., insultes, harcèlement, discrimination, violence physique, homicide);
      4. cadre législatif; nouveaux développements à l’échelle nationale ou étatique.
    2. Efficacité des services de police dans la lutte contre la violence à l’endroit des membres de la communauté LGBT :
      1. casiers judiciaires; arrestations et plaintes; nombre de personnes accusées ou arrêtées pour avoir commis des crimes fondés sur le sexe (ainsi qu’il est décrit à la section a); nombre de personnes reconnues coupables; durée de la peine d’emprisonnement (si la personne est déclarée coupable); nombre de personnes libérées (sans condamnation);
      2. mesures de protection de la police; à savoir s’il existe des unités de police spéciales qui enquêtent sur ce type de crimes;
      3. accessibilité au système de justice : procédure concernant les plaintes; mesures prises par la police à la suite de plaintes; processus judiciaire pour ce type de plaintes (p. ex., ordonnances de protection);
      4. à savoir s’il existe une formation spéciale destinée aux membres des services de police et du système judiciaire pour traiter les dossiers relatifs à la communauté LGBT;
      5. à savoir si les mesures prises par la police dans les cas de violence à l’égard de membres de la communauté LGBT sont évaluées.
    3. Capacité des victimes à se réinstaller ailleurs au pays :
      1. capacité de la victime à fuir l’agresseur sans être retrouvée (p. ex., niveau de risque et facteurs socioéconomiques);
      2. accessibilité aux bases de données pour retrouver une victime (p. ex., registres scolaires, etc.); quels sont les principaux registres nationaux et quelles cartes d’identité sont délivrées par le gouvernement; quelles autorités ont accès à ces registres et dans quelle mesure; niveau de sécurité associé à la protection de ces bases de données; systèmes de surveillance en place à l’échelle nationale et étatique;
      3. cas connus de victimes retrouvées.