Motifs et décision - Gabriel Bazin

​​​Motifs et décision

Personne en cause : Gabriel Bazin

Date de la décision : 27 avril 2022 (version modifiée : 5 mai 2022)​

Tribunal : L. Brittain

Conseil de la personne en cause : S/O


MOTIFS DE DÉCISION

Introduction

[1] Seuls les membres de certaines professions réglementées peuvent représenter des clients devant la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (CISR) contre rémunération. M. Gabriel Bazin n’est membre d’aucun de ces groupes; il a été radié du Barreau du Québec en 1998. Depuis, il a été reconnu coupable de multiples chefs d’accusation d’exercice illégal de la profession d’avocat – y compris en comparaissant devant la Section de la protection des réfugiés (SPR) et la Section d’appel des réfugiés (SAR) de la CISR contre rémunération.Note 1 une décision récente de la SAR de la CISR, il a également été conclu que M. Bazin avait été payé pour ses services.Note 2 À la lumière de ces renseignements, la CISR a avisé M. Bazin qu’elle examinerait sa capacité de comparaître devant le tribunal.

[2] Après avoir examiné la réponse de M. Bazin et la preuve à ma disposition, voici les motifs pour lesquels j’interdis à M. Bazin de représenter ou de conseiller quiconque devant une section de la CISR, quelle qu’elle soit, à l’avenir.

Contexte

[3] M. Gabriel Bazin a été radié du Barreau du Québec le 3 mars 1998.Note 3 Il n’a jamais présenté de requête pour y être réinscrit. Il n’est membre en règle ni d’un barreau provincial, ni de la Chambre des notaires du Québec, ni du Collège des consultants en immigration et en citoyenneté.Note 4

[4] Le 1er février 2018, la Cour du Québec a reconnu coupable M. Bazin de deux chefs d’exercice illégal de la profession d’avocat.Note 5 Cela se rapporte au dossier MB5-01561 (SAR) de la CISR. Ses clients, J.B. et D.B.T., pensaient qu’ils avaient retenu les services d’un avocat. M. Bazin a reçu de l’argent pour fournir des services d’immigration, y compris pour interjeter appel auprès de la SAR, et il s’est sciemment laissé appeler « maître », ce qui constitue le titre professionnel pour un avocat. Il n’a pas corrigé J.B. ou D.B.T. et il ne leur a pas dit qu’il n’était pas avocat. M. Bazin a interjeté appel de cette déclaration de culpabilité, mais elle a été confirmée.Note 6

[5] Le 22 octobre 2021, M. Bazin a de nouveau été condamné par la Cour du Québec dans six cas de pratique illégale du droit.Note 7 Les faits étaient très semblables; M. Bazin a reçu de l’argent pour fournir des services juridiques et/ou il s’est laissé appeler avocat. Sur les six affaires visées par ce jugement, quatre concernaient la pratique illégale du droit devant la CISR. Dans deux d’entre elles, il a accepté de l’argent pour être représentant devant la CISR. Dans le dossier MB8-18566 (SPR),Note 8 M. Bazin a été reconnu coupable d’avoir accepté de l’argent pour être représentant devant la SPR. Dans le dossier MB9-05698 (SAR),Note 9 M. Bazin a été reconnu coupable d’avoir accepté de l’argent pour être représentant devant la SAR.

[6] Dans le dossier MB8-28133 (SPR)/MC0-05266 (SAR) de la CISR,Note 10 M. Bazin a été reconnu coupable de permettre sciemment de se faire appeler « maître ». Son client, M. E. M., croyait qu’il avait engagé un avocat pour le représenter devant la SPR et, lorsque sa demande d’asile a été rejetée, pour interjeter appel devant la SAR. Son appel n’a jamais été déposé et, par conséquent, M. E. M. a été expulsé. Un nouveau conseil a aidé M. E. M. à faire instruire son appel après son expulsion. La SAR a conclu que M. Bazin avait été payé dans cette affaire également. La demande d’asile de M. E. M. a été accueillie en appel.Note 11

[7] La CISR a entrepris d’examiner le statut de M. Bazin à titre de représentant devant elle. Dans une lettre datée du 10 décembre 2021, M. Bazin a été informé du présent examen et il lui a été demandé de formuler des commentaires au sujet de ses déclarations de culpabilité et de sa conduite dans les dossiers MB5-01561 (SAR), MB8-18566 (SPR), MB8-28133 (SPR)/MC0-05266 (SAR) et MB9-05698 (SAR).

Analyse

[8] Dans les motifs suivants, j’explique ma compétence pour examiner la capacité de M. Bazin de comparaître devant la CISR. Je conclus que M. Bazin a été payé pour fournir une représentation dans quatre dossiers de la CISR, ce qui contrevient à la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR). En m’appuyant sur les faits de cette affaire, j’explique également pourquoi une interdiction indéfinie est une sanction appropriée.

1. La Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada a le devoir d’assurer l’intégrité de ses procédures

[9] La CISR a la compétence et l’obligation d’assurer l’intégrité de ses procédures en examinant les cas de représentants rémunérés non autorisés.

[10] Il existe des règles claires quant aux personnes qui peuvent représenter des clients devant la CISR contre rémunération.Note 12 Cela comprend seulement : les avocats qui sont membres en règle du barreau d’une province; les notaires qui sont membres en règle de la Chambre des notaires du Québec; les stagiaires en droit supervisés; les autres membres en règle du barreau d’une province ou de la Chambre des notaires, notamment les parajuristes; et les membres du Collège des consultants en immigration et en citoyenneté.Note 13

[11] Une catégorie limitée de personnes autres peut représenter une personne à titre de bénévole non rémunéré, ce qui peut comprendre des membres de la famille, des groupes communautaires ou des membres d’une institution religieuse.

[12] Cette représentation non rémunérée doit toutefois justement n’être que non rémunérée. Les cas d’allégations ou de préoccupations selon lesquelles un représentant, qui n’est pas membre des professions réglementées particulières énumérées ci-dessus, est rémunéré pour ses services devant la CISR sont régis par la Politique de traitement des plaintes présentées par la CISR contre les représentants rémunérés non autorisésNote 14 (la Politique).

[13] La Politique énonce les marches à suivre pour traiter les cas de conseils qui ne sont pas des « représentants autorisés » et qui peuvent, contre rémunération, représenter une personne, la conseiller ou agir comme consultant auprès d’elle, dans toute affaire devant la CISR. Le président peut déléguer son pouvoir d’examiner la conduite du représentant en vertu de cette politique.

[14] Les faits de la présente affaire viennent de plus d’une section et de plus d’un bureau régional. Par conséquent, le président m’a désignée comme déléguée pour que j’examine cette conduite et que je prenne les mesures correctives appropriées que je juge nécessaires pour protéger l’intégrité des procédures devant la CISR.

[15] Ma compétence en la matière a été reconnue par la Cour fédérale. Dans la décision Rezaei, la Cour a conclu que la CISR a compétence pour surveiller ses propres procédures afin d’en assurer l’intégrité et, en l’absence de procédures précises prévues par une loi ou un règlement, elle peut suspendre les représentants et les empêcher de comparaître devant elle pour le compte de quiconque.Note 15

[16] Dans la décision Domantay,Note 16 la Cour fédérale a reconnu qu’au-delà de la compétence, la CISR a le devoir d’être proactive quant au statut du conseil. Il s’agit de protéger le public et de préserver l’intégrité du système d’immigration du Canada.

2. M. Bazin est un représentant rémunéré non autorisé

[17] D’après les faits dont je suis saisie, M. Bazin a accepté de l’argent pour représenter des clients devant la CISR dans quatre affaires. Cela contrevient directement à la LIPR.

a. Dossier de la CISR CISR MB5-01561 (SAR)

[18] Je dispose d’un jugement de la Cour supérieure du Québec à titre d’élément de preuve qui confirme la déclaration de culpabilité de M. Bazin pour avoir accepté de l’argent en échange de services juridiques en vue d’interjeter appel auprès de la SAR et pour avoir permis de se faire désigner comme un avocat relativement au dossier MB5-01561 (SAR).Note 17 Le juge de première instance a entendu les témoignages des clients en question J.B. et D.B.T., ainsi que de leur nouvel avocat. La Cour a entendu un enregistrement d’une conversation entre M. Bazin et ses clients où ils ont discuté de l’argent qui a été versé à M. Bazin et où M. Bazin a parlé de lui-même comme d’un avocat.

[19] Dans ses observations à ma disposition, bien qu’ils soient quelque peu imprécis, M. Bazin répète sa défense devant la Cour, c’est-à-dire que l’argent en question n’était pas pour lui, mais pour un avocat dont il a retenu les services pour J.B. et D.B.T. La Cour a conclu que cela n’était pas crédible, car M. Bazin a clairement dit dans la conversation enregistrée qu’il n’avait pas facturé à ses clients les services de l’avocat.

[20] La Cour a conclu hors de tout doute raisonnable que M. Bazin avait reçu un paiement dans cette affaire. Les observations de M. Bazin dont je suis saisie sont contredites par sa propre conversation enregistrée avec ses clients où il est question de l’argent payé. Je conclus, selon la prépondérance des probabilités, que M. Bazin a reçu de l’argent pour interjeter appel devant la SAR dans le dossier MB5-01561 (SAR).

b. Dossier de la CISR MB8-18566 (SPR)

[21] Plus récemment, M. Bazin a été reconnu coupable par la Cour du Québec de s’être fait passer pour un avocat et d’avoir reçu de l’argent pour représenter Mme A.N.Y.A. devant la SPR.Note 18

[22] Bien qu’il n’ait pas comparu à l’audience de la SPR dans cette affaire, la Cour a conclu que M. Bazin avait reçu de l’argent pour aider Mme A.N.Y.A. à remplir ses formulaires de demande d’asile et à se préparer pour son audience. M. Bazin a déclaré n’avoir fait cela qu’à titre d’interprète pour un autre avocat. La Cour a jugé que cela n’était pas crédible, car l’autre avocat était rarement présent lorsque M. Bazin rencontrait Mme A.N.Y.A. M. Bazin a été présenté comme avocat spécialisé en immigration. La Cour a conclu que les actions de M. Bazin en remplissant les formulaires de Mme A.N.Y.A. et en donnant des conseils au sujet de la comparution de cette dernière devant la SPR étaient plus celles d’un avocat que d’un interprète. La Cour a jugé que Mme A.N.Y.A. était crédible, car « [p]our elle, le défendeur est avocat, il lui a été présenté comme tel et il a agi en conséquence moyennant rémunération ».Note 19

[23] M. Bazin affirme simplement devant moi qu’il n’a jamais représenté Mme A.N.Y.A. J’estime que cette déclaration n’est pas convaincante. La décision de la Cour indique clairement que M. Bazin a admis que c’était son écriture sur les formulaires de demande d’asile de Mme A.N.Y.A. il n’a pas non plus contesté le fait qu’il l’a préparée en vue de son témoignage à son audience. J’estime que le raisonnement de la Cour est convaincant – ce ne sont pas les actes d’un interprète. M. Bazin n’a présenté aucune observation à cet égard.

[24] M. Bazin n’a présenté aucun élément de preuve qui l’emporte sur les motifs de la Cour et sur sa déclaration de culpabilité hors de tout doute raisonnable dans cette affaire. Je conclus, selon la prépondérance des probabilités, que M. Bazin a été payé pour fournir une représentation dans le cadre de la préparation à l’audience relative au dossier MB8-18566 (SPR).

c. Dossiers de la CISR MB8-28133 (SPR) et MC0-05266 (SAR)

[25] La Cour du Québec a également reconnu M. Bazin coupable de pratique illégale du droit dans cette affaire (en permettant qu’on l’appelle « maître »), mais elle n’a formulé aucun commentaire sur la question de savoir s’il a été payé.Note 20 Depuis, cependant, la SAR a instruit l’appel en question et elle a conclu non seulement que M. E. M. croyait que M. Bazin était un avocat, mais aussi qu’il a payé M. Bazin pour le représenter devant la SPR.Note 21

[26] M. E. M. a rencontré M. Bazin par l’intermédiaire de sa sœur, qui croyait que M. Bazin était avocat. M. E. M. a payé M. Bazin pour qu’il le représente devant la SPR. La SPR a rejeté la demande d’asile de M. E. M., et celui-ci a retenu les services de M. Bazin pour interjeter appel devant la SAR. Cela n’a jamais été fait. M. E. M. a été expulsé parce qu’il n’avait pas d’appel en cours. Selon la preuve de M. E. M., il a été détenu et maltraité à son retour au Cameroun, où il craignait d’être persécuté par le gouvernement.

[27] Devant la Cour du Québec, M. Bazin a avancé que M. E. M. et sa famille avaient commis une fraude en matière d’immigration et qu’il avait donc cessé de les représenter. Il soutient que M. E. M. savait qu’il n’était pas avocat.

[28] La Cour a conclu que l’affirmation mentionnée ci-dessus n’était pas crédible. M. E. M. a rencontré M. Bazin par l’intermédiaire de sa sœur, avec laquelle il travaillait dans une XXXX XXXX XXXX XXXX. Là-bas, M. Bazin donnait des conseils juridiques et s’occupait de questions juridiques. Il était appelé « maître » et il ne corrigeait pas toujours les gens.Note 22 La Cour a conclu qu’il avait été prouvé hors de tout doute raisonnable que M. E. M. et sa famille croyaient que M. Bazin était avocat.

[29] Après l’expulsion de M. E. M., son nouveau conseil a déposé une demande de prorogation du délai pour interjeter appel. Le nouveau conseil a soutenu que M. Bazin était incompétent, qu’il avait été payé pour représenter M. E. M. devant la SPR et qu’il s’était présenté comme un avocat. La SAR a par la suite accueilli la demande et examiné l’appel de M. E. M.Note 23 La SAR a donné à M. Bazin l’occasion de répondre aux allégations portées contre lui, dans l’esprit des politiques de la CISR concernant les allégations portées contre d’anciens conseils.

[30] En réponse à la lettre relative à l’équité procédurale qui lui a été envoyée dans le cadre de la présente procédure, M. Bazin m’a fourni une copie des arguments qu’il avait déjà présentés dans l’appel de M. E. M. Pour cette raison, j’ai examiné la décision de la SAR dans la présente affaire; la commissaire de la SAR qui a tranché l’appel de M. E. M. avait tous les éléments de preuve devant elle et elle était mieux placée que moi pour évaluer les arguments de M. Bazin en appel.

[31] Fait intéressant, dans ses observations communiquées à la SAR dans l’appel de M. E. M., M. Bazin ne présente aucun argument quant à la question de savoir s’il a été payé. Je fais remarquer que ma collègue de la SAR disposait d’un témoignage sous serment selon lequel M. Bazin avait reçu 1000 $ pour représenter M. E. M. devant la SPR.Note 24 Après avoir instruit l’appel, la SAR a conclu que M. Bazin avait reçu ce paiement pour ses services. En l’absence d’éléments de preuve ou d’arguments à l’appui du contraire, je n’ai aucune raison de ne pas accorder de poids à la décision de la SAR et de ne pas admettre que le paiement dans le dossier MB8-21833 (SPR) a été établi selon la prépondérance des probabilités

[32] Je souscris également à la conclusion de la SAR selon laquelle la prétendue préoccupation de M. Bazin pour l’intégrité du système d’immigration n’est pas crédible, étant donné qu’elle a uniquement été formulée après qu’une procédure criminelle a été tranchée en sa défaveur.

d. Dossier de la CISR CISR MB9-05698 (SAR)

[33] M. Bazin a été reconnu coupable de s’être fait passer pour un avocat et d’avoir reçu de l’argent pour représenter Mme J. devant la SAR.Note 25

[34] Mme J. croyait qu’elle retenait les services d’un avocat pour interjeter appel à la SAR. Elle a échangé des messages textes avec M. Bazin où elle s’adressait clairement à lui comme à un avocat et où elle demandait le remboursement du montant de 1000 $ US qu’elle lui avait payé. La Cour a conclu que les éléments de preuve de M. Bazin selon lesquels il n’avait jamais été payé, mais qu’un ami avait donné 1000 $ US à Mme J. simplement pour [traduction] « préserver la paix » n’est pas crédible.

[35] Il y avait des messages textes démontrant que Mme J. pensait que M. Bazin était avocat et qu’elle lui avait demandé un remboursement. Il n’est pas crédible qu’un ami lui rembourse une somme d’argent substantielle qui n’avait jamais été payée – elle n’aurait pas de recours pour insister sur cette question et, par conséquent, il n’était pas nécessaire de préserver la paix. La Cour du Québec a conclu hors de tout doute raisonnable que M. Bazin avait reçu un paiement dans cette affaire.

[36] Dans le cadre de la procédure dont je suis saisie, M. Bazin n’a formulé aucun commentaire particulier sur ce dossier. Comme je l’exposerai ci-dessous, je conclus que ses commentaires plus généraux ne sont pas convaincants.

[37] En l’absence de tout argument de la part de M. Bazin, je n’ai aucune raison de ne pas accorder de poids à la conclusion de la Cour. Je conclus, selon la prépondérance des probabilités, que M. Bazin a reçu de l’argent pour interjeter appel devant la SAR dans le dossier MB9-05698 (SAR).

e. Conclusion sur la représentation contre rémunération

[38] J’ai abordé les arguments de M. Bazin en ce qui concerne les dossiers particuliers mentionnés ci-dessus. M. Bazin a également formulé plusieurs observations générales.

[39] Premièrement, M. Bazin suggère que ses anciens clients mentionnés ont commis des [traduction] « actes illégaux » ou des [traduction] « fraudes ». Ces actes ne sont pas clairement précisés et ils ne sont pas pertinents pour les besoins de la présente décision. Par exemple, une mention de travail illégal n’a aucune incidence sur la décision que je dois rendre. J’ai mis ces observations de côté.

[40] Deuxièmement, M. Bazin affirme qu’un avocat [traduction] « [qu’il] ne nommera pas » trompe la CISR [traduction] « dans ses appels ». J’estime que cette déclaration n’est pas convaincante. Je ne peux pas évaluer cette allégation sans plus de précisions ou d’éléments de preuve. Il a été conclu à maintes reprises que les propres explications de M. Bazin sur ces questions ne sont pas crédibles, y compris en étant contredites par ses propres déclarations enregistrées antérieurement. Les décisions que j’ai examinées sont le fruit d’une appréciation des éléments de preuve présentés, et non des allégations d’un avocat en particulier. Je conclus que cette allégation non fondée ne l’emporte pas sur les autres éléments de preuve dont je suis saisie.

[41] Troisièmement, M. Bazin soutient que ses anciens clients ont signé des déclarations selon lesquelles il n’était pas rémunéré et qu’il leur est maintenant conseillé de faire de fausses déclarations allant dans le sens contraire.

[42] Deux juges de la Cour du Québec, un juge de la Cour supérieure du Québec et une commissaire de la SAR ont pris en considération le témoignage des clients de M. Bazin et les ont jugés crédibles. En revanche, ils ont également conclu que la preuve de M. Bazin sur ces questions n’était pas crédible. Je souligne que dans les procédures criminelles, les faits sont déterminés selon une norme très élevée, c’est-à-dire hors de tout doute raisonnable.

[43] M. Bazin n’a présenté aucun élément de preuve selon lequel il est maintenant conseillé à aux divers clients en question de faire de fausses déclarations. Il n’a présenté aucun élément de preuve ni aucun argument convaincant selon lequel les jugements rendus contre lui sont erronés.

[44] En effet, la suggestion de M. Bazin selon laquelle il a été déclaré coupable à tort n’est pas convaincante. Sa première déclaration de culpabilité a été portée en appel et confirmée. Mis à part de vagues allégations formulées contre des parties qui ne sont pas nommées et des explications précédemment rejetées, M. Bazin ne présente aucun élément de preuve ni aucun argument qui me porte à croire que les décisions des coursNote 26 ou de la SAR à ma disposition sont erronées.Note 27

[45] Pour être claire, je ne siège pas en appel de ces décisions. Toutefois, pour les motifs exposés ci-dessus, après avoir apprécié les décisions et les éléments de preuve qui les sous-tendent par rapport aux arguments de M. Bazin, je préfère les faits tels qu’ils sont établis dans ces décisions.

[46] Par conséquent, selon la prépondérance des probabilités, je conclus que M. Bazin a accepté de l’argent pour représenter des clients devant la CISR aux quatre occasions mentionnées.

3. Une interdiction indéfinie est appropriée dans les circonstances

[47] Selon la preuve à ma disposition, M. Bazin a fait des représentations rémunérées non autorisées à répétition devant la CISR. Sa première déclaration de culpabilité en 2018, confirmée en appel devant la Cour supérieure du Québec, n’a rien fait pour le dissuader.Note 28 M. Bazin a été payé pour fournir des services liés à l’immigration, y compris pour interjeter appel devant la SAR.

[48] En effet, les déclarations de culpabilité de M. Bazin en 2021 concernaient six cas distincts de pratique illégale du droit devant la CISR et dans d’autres affaires. Quatre de ces déclarations de culpabilité avaient trait à la pratique illégale du droit devant la CISR, et deux d’entre elles concernaient des cas où il a accepté de l’argent pour être représentant devant la CISR.Note 29

[49] Plus récemment, la SAR a conclu que M. Bazin avait été payé pour être représentant à la SPR.Note 30

[50] Je fais également remarquer que les actes de M. Bazin ont causé de grands préjudices. Par exemple, l’expulsion de M. E. M. résulte directement du défaut de M. Bazin d’interjeter appel.

[51] Pour ces motifs, j’impose une interdiction indéfinie concernant la représentation ou la prestation de services de consultation à l’égard de quiconque devant une section de la CISR, quelle qu’elle soit, à l’avenir, avec effet immédiat. Je suis convaincue qu’il s’agit d’une sanction appropriée compte tenu de la gravité des circonstances. M. Bazin n’a pas le droit de gagner sa vie en comparaissant devant la CISR, puisqu’il n’est pas un représentant autorisé. Il ne subira donc aucune difficulté économique. Cette interdiction est conforme à la radiation de M. Bazin du barreau et aux déclarations de culpabilité prononcées à son égard; elle constitue aussi une réaction à ses tentatives de contourner ces décisions.

Ordonnance

[52] À compter d’aujourd’hui, il est interdit à M. Gabriel Bazin de représenter et de conseiller quiconque ou de comparaître au nom de toute personne dans le cadre de toute procédure devant une section de la CISR, quelle qu’elle soit. Cette interdiction restera en vigueur indéfiniment.

[53] Je demande aux greffiers des quatre sections de la CISR d’aviser de cette interdiction les personnes représentées à l’heure actuelle par M. Bazin.

(signé)

L. Brittain
Vice-présidente adjointe
Section d’appel des réfugiés
Ottawa

Date de la décision modifiée : 5 mai 2022
Date de la décision initiale : 27 avril 2022

Notes de bas de page​

Bazin c. Barreau de Montréal, 2019 QCCS 2277 : décision de la Cour supérieure du Québec qui a confirmé la décision de la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale. Barreau de Montréal c. Gabriel Bazin, 500-61-515976-208; 500-61-515896 -208; 500-61-515974-203; 500-61-515895-200; 500-61-515975-200; 500-61-519155-205.

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Décision de la Section d’appel des réfugiés (SAR) MC0-05266, 23 février 2022.

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Barreau de Montréal c. Gabriel Bazin, 500-61-515976-208; 500-61-515896 -208; 500-61-515974-203; 500-61-515895-200; 500-61-515975-200; 500-61-519155-205.

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Auparavant le Conseil de réglementation des consultants en immigration du Canada.

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Bazin c. Barreau de Montréal, 2019 QCCS 2277.

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Bazin c. Barreau de Montréal, 2019 QCCS 2277.

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Barreau de Montréal c. Gabriel Bazin, 500-61-515976-208; 500-61-515896-208; 500-61-515974-203; 500-61-515895-200; 500-61-515975-200; 500-61-519155-205.

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Le numéro de dossier MB8-18566 de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (CISR) correspond au numéro de dossier 500-61-515976-208 dans la décision de la Cour du Québec.

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Le numéro de dossier MB9-05698 de la CISR correspond au numéro de dossier 500-61-515975-200 dans la décision de la Cour du Québec.

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Les numéros de dossier MB8-28133 (Section de la protection des réfugiés) et MC0-05266 (SAR) de la CISR correspondent au numéro de dossier 500-61-515974-203 dans la décision de la Cour du Québec.

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Décision de la SAR MC0-05266, 23 février 2022.

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Une rémunération peut comprendre une compensation monétaire ou toute autre rétribution, tels que des biens et services, selon la définition Politique de traitement des plaintes présentées par la CISR contre les représentants rémunérés non autorisés, CISR, 29 septembre 2011.

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Paragr. 91(2) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, chap. 27.

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Politique de traitement des plaintes présentées par la CISR contre les représentants rémunérés non autorisés, CISR, 29 septembre 2011.

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Rezaei c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2003] 3 CF 421 (1re inst.).

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Domantay c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 755.

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Bazin c. Barreau de Montréal, 2019 2019 QCCS 2277.

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Barreau de Montréal c. Gabriel Bazin, 500-61-515976-208; 500-61-515896-208; 500-61-515974-203; 500-61-515895-200; 500-61-515975-200; 500-61-519155-205, para 8-23.

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Barreau de Montréal c. Gabriel Bazin, 500-61-515976-208; 500-61-515896-208; 500-61-515974-203; 500-61-515895-200; 500-61-515975-200; 500-61-519155-205, para 22.

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Barreau de Montréal c. Gabriel Bazin, 500-61-515976-208; 500-61-515896-208; 500-61-515974-203; 500-61-515895-200; 500-61-515975-200; 500-61-519155-205, para 32-47.

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Décision de la SAR MC0-05266, 23 février 2022.

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Barreau de Montréal c. Gabriel Bazin, 500-61-515976-208; 500-61-515896-208; 500-61-515974-203; 500-61-515895-200; 500-61-515975-200; 500-61-519155-205, para 33, 43-46.

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Décision de la SAR, MC0-05266, 23 février 2022

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Décision de la SAR 23 février 2022.

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Barreau de Montréal c. Gabriel Bazin, 500-61-515976-208; 500-61-515896-208; 500-61-515974-203; 500-61-515895-200; 500-61-515975-200; 500-61-519155-205, para 68-88.

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Bazin c. Barreau de Montréal, 2019 2019 QCCS 2277 : décision de la Cour supérieure du Québec qui a confirmé la décision de la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale. Barreau de Montréal c. Gabriel Bazin, 500-61-515976-208; 500-61-515896 -208; 500-61-515974-203; 500-61-515895-200; 500-61-515975-200; 500-61-519155-205.

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Décision de la SAR MC0-05266, 23 février 2022.

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Bazin c. Barreau de Montréal, 2019 QCCS 2277 : décision de la Cour supérieure du Québec qui a confirmé la décision de la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale.

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Barreau de Montréal c. Gabriel Bazin, 500-61-515976-208; 500-61-515896-208; 500-61-515974-203; 500-61-515895-200; 500-61-515975-200; 500-61-519155-205.

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Décision de la SAR MC0-05266, 23 février 2022, portant sur la rémunération dans le dossier connexe de la SPR MB8-28133.

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