Le plaignant a comparu en tant que conseil d’une demandeure d’asile devant la Section de la protection des réfugiés.
La demande d’asile était axée sur la violence fondée sur le sexe. La demandeure d’asile a déclaré que les membres de sa famille ont été victimes de discrimination et d’agressions, y compris d’agressions à leur domicile, de la part d’agresseurs.
Selon la plainte, la commissaire a manqué de sensibilité envers la demandeure d’asile, elle a fait preuve de partialité et elle a privé la demandeure d’asile de son droit à l’équité procédurale.
Plus précisément, selon la plainte, la commissaire a utilisé un ton autoritaire et tranchant, et elle a adopté une attitude agressive et intimidante à l’égard de la demandeure d’asile; elle aurait, dès le départ, [traduction] « déjà formé son opinion relativement à la demande d’asile ». Il a été avancé que, dès le début de l’audience, la commissaire a mis en doute la validité de la preuve documentaire présentée par la demandeure d’asile, a remis en question l’authenticité du rapport médical et a mal interprété le contenu de la lettre du médecin, ce qui a causé une grande détresse à la demandeure d’asile. Selon la plainte, après avoir demandé à la demandeure d’asile la raison pour laquelle celle-ci était retournée à la maison où elle avait été agressée, la commissaire aurait déclaré qu’elle ne croyait pas la demandeure d’asile et qu’elle refusait d’accepter son explication. Enfin, la commissaire aurait posé des questions à la demandeure d’asile alors que cette dernière était bouleversée.
Le Bureau de l’intégrité a transmis la plainte au président pour qu’il décide, en vertu du paragraphe 5.5 de la Procédure pour déposer une plainte à l’endroit d’un commissaire (la
Procédure), si les allégations étaient visées par le processus de traitement des plaintes.
Le président a conclu que les allégations liées à la partialité et à un manquement aux principes de justice naturelle et d’équité procédurale n’étaient pas visées par la
Procédure parce qu’elles n’étaient pas liées à la conduite de la commissaire. Le président a conclu que les autres allégations étaient liées à la conduite de la commissaire et les a renvoyées au directeur du Bureau de l’intégrité (le directeur) pour qu’il effectue une enquête.
La commissaire a été invitée à fournir au directeur une réponse à la plainte et a ensuite soumis des observations écrites. Le directeur a écouté l’enregistrement audio de l’audience et a examiné les observations des parties. Il a préparé un rapport d’enquête provisoire présentant ses constatations de faits et son analyse préliminaires, et il a donné aux deux parties l’occasion de le commenter. La commissaire et la plaignante ont toutes deux présenté des observations écrites. Le directeur a ensuite préparé un rapport d’enquête final.
Dans le rapport d’enquête, le directeur a conclu qu’il n’y avait eu aucun manquement au Code de déontologie des commissaires de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (le
Code de déontologie) pour les raisons suivantes :
- Les allégations selon lesquelles la commissaire aurait commencé l’audience de façon agressive ou conflictuelle, qu’elle aurait été en colère ou qu’elle aurait pris un ton autoritaire, n’étaient pas fondées. Le ton et l’approche de la commissaire étaient neutres et professionnels.
- En tant que décideuse, la commissaire avait le pouvoir de poser des questions — même à répétition — sur l’authenticité de la preuve documentaire. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle la commissaire a fait preuve de partialité en mettant en doute la validité des rapports présentés par la demandeure d’asile, le fondement d’une telle allégation se rattache au processus décisionnel, et non à la conduite de la commissaire.
- En ce qui concerne l’allégation selon laquelle la commissaire a mal interprété la lettre du médecin lorsqu’elle l’a lue à haute voix pendant l’audience, ce qui a bouleversé la demandeure d’asile, la commissaire a présenté ses excuses à la demandeure d’asile à plusieurs reprises, tant pendant l’audience que dans ses motifs de décision. La commissaire a assumé la responsabilité de cette erreur et elle s’en est excusée dans les observations qu’elle a transmises dans le cadre de l’enquête. Bien que l’incident ait eu des répercussions défavorables sur la demandeure d’asile parce qu’il a causé à cette dernière une détresse émotionnelle importante, l’erreur commise par la commissaire en l’espèce se distingue d’une conduite constituant un manquement au
Code de déontologie.
- Il était raisonnable pour la commissaire de poser à la demandeure d’asile des questions difficiles ou délicates au sujet de l’agression. La façon dont les questions ont été posées à la demandeure d’asile n’était pas inappropriée, et rien n’appuie l’allégation selon laquelle la commissaire n’a pas cru l’explication de la demandeure d’asile.
- Dans l’ensemble, la commissaire a fait preuve de sensibilité, par exemple en prévenant la demandeure d’asile qu’elle avait des questions difficiles à lui poser, en la rassurant et en lui offrant de faire une pause lorsqu’elle a été prise par l’émotion. Cependant, il y a d’autres cas où une approche plus rassurante aurait été justifiée. Le ton neutre de la commissaire et ses questions directes pouvaient parfois être interprétés comme un manque de sensibilité de sa part. En outre, à plus d’une occasion, la commissaire a répété la même question à la demandeure d’asile sans offrir de précisions ni de détails supplémentaires, ce qui a pu contribuer au malaise de la demandeure d’asile. Dans les observations qu’elle a présentées dans le cadre de l’enquête, la commissaire a constaté ces remarques et elle a déclaré qu’elle tiendrait compte de cette rétroaction et qu’elle adapterait sa façon de poser des questions.
- La conduite de la commissaire était généralement conforme aux attentes énoncées dans le
Code de déontologie, lesquelles sont fondées sur les Directives numéro 4 du président intitulées Revendicatrices du statut de réfugié craignant d’être persécutées en raison de leur sexe. Toutefois, la commissaire aurait intérêt à prendre davantage conscience du fait que certaines questions ou une approche inquisitoire peuvent avoir un effet défavorable sur un demandeur d’asile, et elle devrait adapter sa manière de poser des questions en conséquence.
Le rapport d’enquête a été remis au président. Ce dernier était convaincu que l’enquête était approfondie et équitable. Le président a accepté les conclusions du rapport et a conclu qu’il n’y avait eu aucun manquement au
Code de déontologie.
Les deux parties ont été informées du règlement de la plainte au moyen de lettres de décision de la part du président. Ce dernier a affirmé qu’il était convaincu que la commissaire avait non seulement pris note des conseils contenus dans le rapport, mais qu’elle en tiendrait également compte dans le cadre d’audiences futures.
La plainte a été rejetée, et le dossier est clos.